Le courage pour dire la vérité : un critère de sainteté de premier ordre

mardi 1er septembre 2020
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Le courage pour dire la vérité : un critère de sainteté de premier ordre



Homélie de la Messe du martyre de saint Jean-Baptiste – 29 août 2020

« Saint Jean-Baptiste est le dernier des prophètes de l’Ancien Testament et le premier des martyrs. Précurseur du Christ, né juste six mois avant Jésus (cf. Lc 1,36) il a « couru » devant (c’est le sens du mot pré-curseur) Jésus pour préparer les cœurs à sa venue. Cette course a été couronnée par la palme du martyre. Comme Jésus, il a été mis violemment à mort vers l’âge de 33 ans pour avoir dénoncé l’adultère du roi Hérode. Saint Bède, moine du IXe siècle, a écrit à son sujet : « Saint Jean donna sa vie pour [le Christ] ; même si l’on ne lui ordonna pas de renier Jésus-Christ, on lui ordonna uniquement de taire la vérité » (Cf. Hom. 23 : ccl 122, 354). Jean-Baptiste n’a pas tu la vérité et ainsi, il est mort pour le Christ qui est la Vérité, disait Benoît XVI. Et il ajoutait : « Précisément pour l’amour de la vérité, il ne fit pas de compromis et n’eut pas peur d’adresser des paroles fortes à ceux qui avaient égaré la voie de Dieu […]. Son exemple nous rappelle à nous, chrétiens de notre temps, qu’aucun compromis n’est possible avec l’amour du Christ, avec sa Parole, avec sa Vérité. La Vérité est Vérité, il n’existe pas de compromis. La vie chrétienne exige, pour ainsi dire, le « martyre » de la fidélité quotidienne à l’Évangile, c’est-à-dire le courage de laisser le Christ grandir en nous et de le laisser orienter notre pensée et nos actions » (Benoît XVI, Audience générale du 29 août 2012).

Saint Jean-Baptiste est un grand modèle de courage. Le récit de la vocation du prophète Jérémie, dont la vie présente beaucoup de similitudes avec celle de saint Jean-Baptiste, évoque l’alliance particulière de Dieu avec son prophète. Dieu lui commande : « Ceins-toi les reins, lève-toi et tu leur diras tout ce que je t’ordonnerai » (Jr 1,17). Jérémie doit mettre sa ceinture. Dans l’antiquité, la ceinture servait à relever le pan de sa tunique, pour gagner en agilité, entre autre pour la marche ou le travail. On dirait aujourd’hui : « Retrousses-toi les manches ! ». La ceinture servait aussi à porter les armes (Cf. Jg 3,16 ; 2Sm 21,16 ; 2Sm 20,8). Elle renvoie donc symboliquement au combat pour la vérité. Saint Paul exhorte les chrétiens à prendre la Vérité pour ceinture et à s’armer du glaive de l’Esprit : la Parole de Dieu ! (cf. Ep 6,14.17). Ce n’est que s’il revêt la ceinture de la vérité, s’il fait corps avec elle – par sa droiture morale et par l’union intérieure de son âme avec Jésus qui est la Vérité – que le missionnaire pourra aisément tirer de son sein le glaive de la Parole de Dieu qu’il a reçue et le manier avec agilité pour blesser d’amour le cœur des hommes. Ce combat est difficile. Les hommes de Dieu se trouvent souvent bien seuls face aux puissants et face au peuple qui résistent aux appels de Dieu à la conversion.

Dieu prévient ses amis contre la peur : « Ne tremble pas devant eux, sinon, c’est moi qui te ferai trembler devant eux » (Jr 1,17). La peur ici évoquée est une sorte d’effroi qui paralyse sur place, qui tétanise : une panique qui fait perdre au prophète ses moyens de sorte qu’il perd le courage de porter son message. Saint Jean-Paul II a rappelé les paroles du cardinal Wynszyński qui ont guidé sa lutte contre le communisme et qui éclairent son grand appel tant de fois répété : « N’ayez pas peur ! ». « La plus grande faiblesse de l’apôtre est la peur – disait Wynszyński. C’est le manque de foi dans la puissance du Maître qui réveille la peur ; cette dernière oppresse le cœur et serre la gorge. L’apôtre cesse alors de professer.

Reste-t-il apôtre ? Les disciples, qui abandonnèrent le Maître, augmentèrent le courage des bourreaux. Celui qui se tait face aux ennemis d’une cause enhardit ces derniers. La peur de l’apôtre est le premier allié des ennemis de la cause » (Jean-Paul II, Levez-vous ! Allons, Mame-Plon, Paris 2004, p. 168).

Saint Jean-Baptiste savait très bien le risque qu’il courait. Mais il n’a pas cédé à la peur, il a rempli sa mission en rappelant au roi Hérode la vérité sur le mariage.

On assiste aujourd’hui à une recrudescence de la peur. Les gens sont angoissés pour l’avenir et la crise sanitaire, largement relayée par les médias, suscite un climat de crainte. Nos églises ne sont-elles pas devenues parfois des lieux dangereux dans l’inconscient des personnes ? La vertigineuse baisse de la pratique des sacrements ne s’explique-t-elle pas en partie par la peur ? La juste crainte de s’approcher indignement du Corps et du Sang du Seigneur n’a-t-elle pas été remplacée par la peur d’être contaminée par le coronavirus ? Il nous faut aujourd’hui donner un témoignage clair et courageux de la Présence réelle et substantielle de Jésus dans l’Eucharistie comme St Jean-Baptiste a donné ce témoignage qui lui a valu le martyre.

Dans son avant-dernière audience, Benoît XVI nous avait rappelé la nécessité de combattre pour la vérité : « Les épreuves auxquelles la société actuelle soumet le chrétien, [...] sont nombreuses, et touchent la vie personnelle et sociale. Il n’est pas facile d’être fidèles au mariage chrétien, de pratiquer la miséricorde dans la vie quotidienne, de laisser une place à la prière et au silence intérieur. Il n’est pas facile de s’opposer publiquement à des choix que beaucoup considèrent évidents, tels que l’avortement en cas de grossesse non-désirée, l’euthanasie en cas de maladies graves, ou la sélection des embryons pour prévenir des maladies héréditaires ». Et il ajoutait : « La tentation de mettre de côté sa propre foi est toujours présente et la conversion devient une réponse à Dieu qui doit être confirmée à plusieurs reprises dans notre vie. […] Se convertir signifie ne pas se refermer dans la recherche de son propre succès, de son propre prestige, de sa propre position, mais faire en sorte que chaque jour, dans les petites choses, la vérité, la foi en Dieu et l’amour deviennent la chose la plus importante » (Benoît XVI, Audience générale du 13 février 2013).

Dieu aujourd’hui encore exige de nous de surmonter la peur, et dans le même temps il nous promet sa fidélité : « Ils te combattront, mais il ne pourront rien contre toi, car je suis avec toi pour te délivrer » (Jr 1,18). Le Seigneur sera « le rocher qui nous accueille, toujours accessible » comme disait le Psaume 18. « Notre forteresse et notre roc, c’est lui ! » »

Extrait de l’homélie publiée le 29 août 2020 sur fmnd

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