Loi dite « bioéthique » : une loi de malédiction nationale

mardi 16 février 2021
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Loi dite « bioéthique » : une loi de malédiction nationale



« Ce qui arrive à la France avec le vote prochain de la loi dite de bioéthique, ne constitue que l’aboutissement d’une longue suite d’erreurs qui ont commencé à être proclamées au grand jour et traduites en actions concrètes depuis la révolution française de 1789. Celle-ci a vu triompher la philosophie des Lumières dont le but est l’élimination de la religion chrétienne de la société. La brutalité et la cruauté employées à l’époque, obligèrent les continuateurs de ce programme à nuancer les modalités de leur plan. On parla de cantonner la religion à la conscience privée, de lui laisser les moyens de s’exprimer dans ce cadre en toute liberté, pourvu qu’elle ne se manifestât pas dans l’espace public, ou pas trop. Il y eut des nuances dans la seconde moitié du 19e siècle. Certaines furent sincères, d’autres pas. La malheureuse affaire Dreyfus (1898), bloqua toute nuance. Ce fut l’affrontement. L’absence de politique sociale de la III ème République fit grossir le parti socialiste, qui fin 1902, put constituer avec les radicaux une majorité qui allait pouvoir voter la séparation des Églises et de l’Etat en 1905.

La condamnation de cette loi par le Pape Pie X en 1906, dans l’encyclique « Vehementer nos » comporte des réflexions véritablement prophétiques, qui éclairent d’une manière singulière la loi extrêmement pernicieuse qui sera, en fin de compte votée par l’assemblée nationale, malgré l’opposition du sénat. Voilà pourquoi je remonte à cette époque. Mais cela ne veut pas dire qu’il faut supprimer ou modifier cette loi. Le mal est fait dans les consciences, et ce n’est pas un acte législatif qui changera quoi que ce soit en la matière. Il faut en effet tenir compte du facteur temps. Si en 1906, on avait proposé l’actuelle loi de bioéthique, aux parlementaires qui avaient voté un an auparavant la séparation, ils l’auraient repoussée avec indignation ! Ils voulaient certes des changements de civilisation, mais pas aussi radicaux. Ils n’auraient pas cru qu’au nom de leur idéologie on en arriverait à cette monstruosité législative d’aujourd’hui ! Tout comme Robespierre en 1790, n’aurait pas imaginé qu’il serait le chef d’orchestre de la Terreur quatre ans plus tard !
Pie X n’hésite pas à écrire dans son encyclique que la séparation de l’Eglise et de l’Etat est aussi pernicieuse pour les deux entités concernées. Il cite même son prédécesseur Léon XIII, qui savait parfaitement ce qu’il en était de ce risque de séparation, écrivant dans l’encyclique « Immortale Dei. » de 1885 « Les sociétés humaines ne peuvent pas sans devenir criminelles, se conduire comme si Dieu n’existait pas, ou refuser de se préoccuper de la religion comme si elle leur était chose étrangère ou qui ne pût leur servir de rien. Quant à l’Eglise, qui a Dieu lui-même pour auteur, l’exclure de la vie active de la nation, des lois, de l’éducation de la jeunesse, de la société domestique, c’est commettre une grande et pernicieuse erreur. ». D’où le souhait de Léon XIII en 1892, de voir les catholiques français s’impliquer dans la vie politique de leur pays, à la fois pour lutter contre le communisme et empêcher la séparation de l’Eglise et de l’Etat.

Je crois, de plus, que Jules Ferry était de bonne foi quand il affirmait qu’il voulait conserver « la bonne vieille morale de nos pères » au sein de l’école laïque. Je l’ai personnellement vécu dans les années 1950. Mais nous étions sur la fin. Car cette bonne vieille morale était chrétienne, et sans la foi en Dieu, sa durée de vie est forcément limitée. Même chose pour le recours à la loi naturelle. Il ne tient pas devant une impiété sociétale. C’est un peu comme pour l’art et la culture occidentale, vous en ôtez le christianisme, et une importante partie devient incompréhensible et inaccessible !

En voulant construire sans Dieu, et en fait contre Dieu, car face à Lui la neutralité est impossible, les hommes ne peuvent reproduire que la triste expérience de Babel, nom qui a le double sens de confusion et de porte des cieux. C’est ainsi que le mensonge recouvre l’inévitable goût de la transgression pour qui veut s’affranchir de l’ordre divin. Le cocktail du diviseur, le diable, comporte toujours une part de vérité (petite) et de mensonge (énorme) pour pousser à la transgression. Le double sens de Babel a conduit les hommes, non pas aux cieux de l’unité dans l’amour, mais dans l’enfer terrestre des divisions, des incompréhensions. Qu’en était-il de la liberté et de l’égalité sous la Terreur, et dans le génocide vendéen ? N’y avait-il pas écrit au dessus de la porte du camp de la mort d’Auschwitz « le travail rend libre. » ? C’est une transgression du même ordre que de placer l’avortement dans le droit des femmes. Elles qui ont le privilège de donner la vie et de la faire croître dans leur propre chair, sont aujourd’hui aveuglées par les éclairs de la transgression au point de vouloir prouver leur liberté en donnant la mort aux enfants qu’elles ont conçus. Alors, me dira-t-on, que change l’allongement du temps pour avorter jusqu’à 14 semaines, puisque de toutes façons c’est un meurtre ! Eh bien beaucoup de choses, parce que l’ossification existe à ce stade. Ce n’est plus du sang qu’on va aspirer avec un peu de tissu humain. C’est un crâne qu’il faudra écraser avec cette pince, un petit corps qu’il faudra démembrer vivant. Et ainsi le praticien et la demandeuse se sentiront plus transgresseurs, plus meurtriers. Un pas de plus dans la conscience de l’homicide sera franchi, on pourra ainsi augmenter la jouissance de la transgression que peut constituer un assassinat ! De plus, les médecins devront renoncer à la clause de conscience que la loi de 1974 leur concédait pour refuser l’IVG, et devront donner l’adresse d’un collègue qui la pratique. Et cela les transforme en complice de l’acte. Imaginez qu’un de mes paroissiens vienne me demander d’étrangler sa belle-mère parce que sa situation psycho-sociale la lui rend insupportable. Et que lui déclarant l’impossibilité où je me trouve d’accéder à sa demande, je lui indique un confrère qui fera cela très bien, et ira peut-être jusqu’à lui donner l’extrême onction ! Si le meurtre a lieu, les juges ne me déclareraient-ils pas complice ? La qualification prophétique de tueur à gage donnée par le Pape François aux avorteurs et leurs complices prend ainsi tout son sens.

Mais cela ne suffisait pas à l’ensemble des députés socialistes, restés tard dans l’hémicycle, un beau soir de l’été dernier, pour élargir la tache de sang, devenue flaque, par la volonté de la majorité présidentielle. L’horreur devait aller à son comble, avec l’IMG portée à 9 mois ! Certes il n’y avait point de délai, pour ce type d’interruption médicale de grossesse. Mais jusqu’à présent on ne l’étendait qu’aux enfants mal formés, ce qui posait déjà de redoutables questions. Aujourd’hui, si la loi est votée avec l’amendement socialiste, le fœtus de 9 mois, même sans aucune anomalie, sera mis à mort dans le ventre de sa mère, si celle-ci le refuse au nom d’une détresse psycho-sociale. Et là on arrive à l’intolérable, la légalisation systématique du foeticide. Chacun appréciera le ménagement des âmes sensibles. On injectera dans le cœur du fœtus du chlorure de potassium, comme aux États Unis, pour les exécutions par injection létale. L’endormira-t’on auparavant, aura-t’il droit ensuite au curare, pour paralyser ses muscles pour en arriver finalement à l’injection finale ? A ma connaissance, cela n’est pas précisé, sans doute parce que les pinces, qui démembreront le fœtus dans le ventre maternel, empêcheront d’utiliser le vilain mot d’infanticide. L’habileté du gynécologue jointe à la prudence du législateur auront transformé en cadavre ce qui sortira du ventre de la femme et qu’on ne pourra pas qualifier d’enfant ! Et voici la boîte à chaussures dans laquelle on le déposera , comme aux États Unis, grâce à la législation Obama que continue Biden, qui se dit catholique ! Et ainsi les esprits seront préparés à la mise à mort des vieillards dépendants, ne pouvant plus être soutenus par leur famille , qu’on déclarera en détresse psychologique et sociale, ouvrant ainsi la porte à toutes sortes d’abus dans la sélection des soins à dispenser ou non.

De telles mesures législatives sont la conséquence logique de la transformation de l’enfant en objet-marchandise que tout un chacun a le droit de désirer. Le Sénat, dans sa sagesse, vient de refuser l’élargissement de la PMA aux femmes célibataires et aux couples de femmes, ainsi que d’autres aberrations de ce projet de loi. Qu’il en soit remercié au nom de l’humanité et des français. Mais, il y a fort à craindre que les députés n’en tiennent pas compte. Et tout naturellement, on ira un jour jusqu’à la GPA, que l’Etat de New York vient de légaliser.

Aussi, Monseigneur le Duc d’Anjou, Louis de Bourbon, Chef de la Maison de Bourbon a-t’il raison d ́écrire dans ses vœux aux français, en cette année 2021 : « Pour notre civilisation, Dieu et César doivent tous les deux avoir leur place, distinctes, mais étroitement complémentaires, dans une relation d’équilibre ordonné. Quand le premier est exclu, comme le voudraient certains, le corps social entier est déséquilibré. ». Ainsi sont pris en compte les avertissements de Pie X et de Léon XIII que je citais au début de mon propos. Et le Prince en déduit logiquement : « Enfin, il s’agit de rendre à l’homme sa dignité, de sa conception à sa mort. L’homme n’est ni une denrée, que l’on pourrait acheter pour son plaisir, ni un robot qu’il faudrait augmenter ou diminuer à la convenance de maîtres tout puissants. ».

Je suis particulièrement heureux, en ces moments difficiles pour la France, d’entendre ces paroles de vœux réconfortantes, venant du Chef de l’auguste famille, héritière de nos premiers rois Capétiens , qui pendant des siècles a construit ce pays, et de constater leur accord complet avec les grands Papes qui ont senti venir le danger.

Puisse l’Eglise catholique témoigner dans le même sens, et utiliser toutes ses possibilités d’action pour empêcher l’actuel État français de continuer à se déshonorer. Dès maintenant, il faut envisager des désobéissances passives et le faire savoir. Il faut aussi avertir que, si cette ligne rouge qu’est la loi bioéthique est franchie, tous ses partisans, des concepteurs à ceux qui l’appliqueront pourront être considérés par l’Eglise comme des pécheurs publics causant un scandale particulièrement grave à l’instant même où ils auront voté ce texte, et pour le président de la république, à l’instant même où il signera le décret d’application. Tous les sacrements, hormis la pénitence devront normalement leur être refusés, comme l’ont fait bien des prêtres courageux (par exemple, en France, un Superieur religieux a fait dire à Valéry Giscard d’Estaing de ne pas s’approcher de la communion lors d’une messe à laquelle il assistait).

Le canon 1398 du Code de droit canon de 1983 prévoit en effet l’excommunication « latae sententiae. » pour qui procure un avortement, si l’effet s’ensuit. Autrement dit que cette excommunication est automatique dès l’acte commis pour les acteurs directs du crime. Il sera du ressort des évêques de choisir de les frapper de cette peine, ou au minimum de leur rappeler qu’ils sont pécheurs publics. En mai 2007, le Pape Benoît XVI a approuvé la menace d’excommunication prononcée par l’Eglise mexicaine contre les politiciens ayant voté Ia légalisation de l’avortement à Mexico. Déjà en 2004, le Cardinal Joseph Ratzinger avait écrit dans un mémorandum aux évêques des États Unis d’Amérique : « Concernant les péchés graves d’avortement ou d’euthanasie, lorsque la coopération formelle d’une personne devient manifeste (comprendre lorsqu’un homme politique catholique fait systématiquement campagne pour l’avortement ou l’euthanasie et vote des lois permissives sur ces sujets), son pasteur devrait le rencontrer, lui expliquer l’enseignement de l’Eglise, l’informer qu’il ne doit pas se présenter à la sainte communion tant qu’il n’aura pas mis fin à sa situation objective de péché, sans quoi l’eucharistie lui sera refusée. ». Il ne faisait qu’interpréter le canon 915 du Code sur la persistance avec obstination dans le péché. Quelques évêques américains comme le Cardinal Burke ont suivi ces recommandations.

Le Pape François a rappelé cette position le 7 mai 2013 dès le début de son pontificat. Toutes ces personnes, si elles ne se sont pas repenties, se verront très probablement refuser les honneurs des funérailles chrétiennes, au moins comme pécheurs publics. C’est la position personnelle que j’adopterai et que je soumets à l’autorité de nos évêques face à une situation où la pratique de l’avortement s’intensifie et est encouragée par la loi civile. Il est de plus de mon devoir de dire que de tels dirigeants politiques ne pourront qu’attirer de grandes catastrophes sur la France dont ils auront achevé de souiller le titre de Fille aînée de l’Eglise, et qu’ils deviendront pour tout le pays des porte malheur, autant de ladies Macbeth, s’efforçant en vain d’éliminer le sang humain collé à leur peau , malgré « tous les parfums d’Arabie. » qui ne manquent pourtant pas dans notre beau pays !

Enfin, il devrait apparaître comme particulièrement odieux aux Français qui traversent actuellement une crise très grave, dont ils ne voient pas très bien les conséquences sur le long terme, que pour faire plaisir à une petite minorité de gens nantis, on légifère sur des transformations très graves de l’humanité, on rabote les libertés essentielles, qu’on multiplie les maladresses en tout genre, quand ce n’est pas pire !

Et l’on ose exiger des croyants qu’ils signent sur un papier que la loi de la république est supérieure à la loi de Dieu. Alors se pose une question fort angoissante : n’est -ce pas pour mener à des impasses, qui justifieront des mesures exceptionnelles pour en sortir ? »

Père Michel Viot

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Michel Viot