La mort plane sur la France L’euthanasie du citoyen

dimanche 28 août 2022
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La mort plane sur la France
L’euthanasie du citoyen

« La sédation profonde des soins palliatifs maintient encore suffisamment de vie pour que le « tout est accompli » soit prononcé par Dieu lui-même et permette à ce moment là, et seulement à ce moment-là, au corps qui se bat encore contre la mort de lâcher prise, accompagné jusqu’au bout par l’amour fraternel qui lui aura épargné d’atroces douleurs sans le plonger immédiatement dans la mort, interrompant comme par effraction un accomplissement qui n’appartient jamais à un individu seul ! Pour le croyant, c’est à Dieu d’en décider le moment, mais pour celui qui ne croit pas et veut simplement s’en tenir à une certaine sagesse, il est certain qu’il serait insensé de donner aux mêmes hommes dont la mission est de protéger la vie le droit de la supprimer ! D’ailleurs les partisans de l’euthanasie le reconnaissent eux-mêmes, et vont jusqu’à l’écrire, accomplir un tel acte n’est jamais chose aisée.
Dans son livre très contestable « Médecin catholique pourquoi je pratique l’euthanasie », le docteur Corinne Van Oost écrit « Injecter un produit létal à quelqu’un, même mourant, c’est combattre la vie ; la forcer à s’arrêter alors qu’elle essaye toujours de résister. À ce moment là, on se retrouve en collaboration avec le mal, on va dans le même sens. Alors oui, on a le sentiment de « tuer ». ». Et plus loin , il y a cette comparaison qu’il est de mon devoir de relever « Comme le Christ, dans sa prière au moment de l’agonie, je voudrais que cela puisse ne pas arriver….C’est pour ça qu’à mes yeux, chaque euthanasie est véritablement le lieu de Gethsémani. Là où Jésus, qui était né petit enfant, impuissant, a vécu la pleine détresse à l’approche de la mort, et a accepté de marcher vers l’anéantissement de la croix… Bien sûr le geste me blesse toujours, car il n’est pas intrinsèquement bon. Mais cela peut être juste de se laisser blesser. ». Chacun l’aura compris il y a référence à Matthieu 26 36-39 et à Genèse 32, 23-31 , la lutte de Jacob avec l’ange. Le patriarche en ressort vainqueur, mais il est boiteux ! Autre référence biblique du docteur Van Oost, Marc 2, 23. « le sabbat a été fait pour l’homme et non l’homme pour le sabbat », justifiant ainsi la transgression d’un des dix commandements par Jésus. En euthanasiant, elle transgresse en effet le commandement « tu ne commettras pas de meurtre », en donnant la mort. Or Jesus prononce cette parole pour justifier ses disciples, tenaillés par la faim qui arrachent à la main des grains de blé dans un champs un jour de sabbat. Et ce geste de survie est condamné par certains pharisiens qui l’assimilent à un travail de moissonneurs transgressant l’ordre du repos sabbatique ! Mais la finalité de leur acte est le maintien de la vie. Cette référence ne convient donc pas, tout comme les précédentes. A Gethsémani, Jésus manifeste son effroi devant la mort cruelle et douloureuse de la croix, et tout naturellement préférerait une autre fin, ce qui prouve bien la réalité de son humanité. Mais par obéissance au Père,il se soumet à sa volonté alors qu’il aurait été libre de s’en soustraire. L’adjectif « impuissant », utilisé par le docteur Van Oost n’a pas sa place ici. Car en nous avançant plus loin dans la passion, nous devons croire que Jésus aurait pu descendre de la croix quand les grands prêtres l’y mettent au défit ! Et le « pourquoi m’as-tu abandonné ? » ne sera prononcé que sur la croix et non à Gethsémani, comme dans une ou deux de ses conférences le Père Ringlet rédacteur de la postface du livre le dira à tort, oubliant de préciser, ce qui est plus grave qu’il s’agit du début d’un psaume 22 (21) qui dès la fin du v22 témoigne de la proximité de Dieu et se termine par une affirmation de confiance que la mort empêchera Jésus de prononcer. Je crois aussi que l’évocation de Jean 21, la prédiction du martyr de Pierre par Jésus n’a pas non plus sa place dans la brillante postface de mon confrère. Pierre sera conduit, sans l’avoir explicitement voulu à rendre témoignage au Christ par le martyr. Comment un théologien aussi averti que ce vice doyen de Louvain peut-il laisser entendre que le docteur Van Oost pourrait le conduire, en fait par l’euthanasie, à rendre témoignage au Christ, associant ainsi euthanasie et martyr au point de les confondre ? Que fait-il du Magistère de l’Eglise et de ce qu’il enseigne depuis longtemps ?

Il ne me démentira certainement pas si je dis que ce n’est pas, et de loin sa première préoccupation. D’ailleurs il a l’honnêteté de ne pas s’en cacher et n’occupe plus de position officielle dans l’Eglise catholique. Ses opinions très en retrait de la doctrine officielle sont connues depuis longtemps, et il les défend sans dissimulation, avec talent, et je dirai même avec art, ce dernier relevant plus de la littérature et de la poésie (mais de bonnes factures) que de la théologie. Qu’il veuille absolument lier les soins palliatifs à l’euthanasie me gêne cependant, qu’il ne veuille pas faire l’effort, du moins pour son lecteur catholique d’expliquer la conception thomiste du double effet, même s’il ne l’admet pas, m’ennuie parce que c’est la doctrine officielle de l’Eglise catholique à laquelle il appartient, et de plus comme prêtre toujours en exercice, et que c’est sur elle que s’appuient les évêques de France pour expliquer leur position. C’est ainsi que très logiquement, il ne voit pas de différence entre la sédation profonde maintenue jusqu’au décès et l’euthanasie. Et ceci est grave de sa part, parce que effectivement, cela est loin d’être évident, et que si sur le plan médical, nous nous trouvons devant des actes qui peuvent apparaître comme voisins, il n’en va pas de même sur le plan juridique, et ceci est capital pour notre sujet, puisque l’élaboration d’une loi est envisagée en France. L’interdiction d’administrer un produit létal à un patient, constitue un des éléments du serment d’Hippocrate qui fonde la confiance entre le malade et son médecin, tout comme le secret de la confession entre le pénitent et le prêtre. Une société civilisée doit avoir des repères, des lieux et des hommes de sûreté et de confiance, sinon elle ne tarde pas à tomber dans la barbarie. Certes j’ai plus de respect pour une personne qui reconnaît son acte de transgression que pour celle qui le dissimule, mais cela ne veut pas dire que je l’approuve. La révélation divine contenue dans les Saintes Écritures nous apprend que l’homme n’est pas demeuré dans sa bonté originelle et que justement l’origine du mal est dans une transgression de l’ordre de Dieu. Transgresser sera toujours dangereux pour un chrétien et risque de devenir diabolique s’il invoque sa liberté de conscience !

Quand en 1521 Martin Luther déclara à Worms devant la Diète d’Empire convoquée par Charles Quint qu’il ne se rétracterait pas car « parler contre sa conscience n’est ni sûr ni honnête », il avait précisé auparavant « ma conscience est liée par les Écritures » et il était bien loin de rejeter toute Tradition. Quelques temps plus tard le Concile de Trente précisera qu’on ne peut séparer l’Ecriture de la Tradition. Un catholique peut défendre la liberté des consciences, car on ne peut contraindre par la force en matière religieuse, mais il ne saurait invoquer la liberté de conscience pour la foi et les mœurs, car il est tenu par les limites que Dieu lui a tracé pour son bien et celui d’autrui dans sa Révélation et dans la Tradition de son Église, et je rappelle que le fondamentalisme biblique n’appartient pas à la tradition de l’Eglise catholique.
Il faut aussi sans cesse redire que la Loi divine, résumée par les dix commandements n’a pas eu au cours des siècles qu’un usage religieux. Elle a eu une fonction civique, en dehors de toute croyance, rite ou pratique. L’interdiction du vol, du meurtre, de l’adultère, l’obligation de respecter ses parents constituent des piliers indispensables à toute société. Nous voyons aujourd’hui où mène leur continuelle transgression. Dans la question qui nous occupe, le législateur, quelle que soit son appartenance ou non-appartenance à une religion ne peut pas mettre sur le même plan l’administration d’un produit létal et d’un produit calmant, pas plus qu’il ne doit ignorer que l’augmentation de doses de calmants peut devenir mortelle, mais dans ce dernier cas qui met en cause la pratique de la médecine, il ne peut légiférer qu’en concertation avec ceux qui doivent traiter la douleur. Ces derniers seuls sont à même de donner les conseils pratiques qui permettent de soulager ceux qui souffrent, en faisant preuve d’une extrême vigilance face aux risques d’abus. Ceux-ci d’ailleurs ne sont pas difficiles à imaginer quand on voit de quelle manière ce beau service public qu’était l’hôpital en France s’est dégradé en une vingtaine d’années, et quel sort on réserve aux personnes âgées qui n’ont pas le bonheur d’avoir de l’argent ! Quand je lisais récemment que la gériatrie remplissait les services d’urgence, quand je vois ce que coûte à la société (par l’intermédiaire de la Sécurité sociale) un traitement médical anti cancéreux , je dis que légaliser l’euthanasie équivaut à donner le droit d’achever les malades. Et du coup je me pose de sérieuses questions sur les mobiles qui poussent certains médecins à ne pas traiter des cancers chez des personnes âgées. Quand je pense à la peine que nous pouvons ressentir en devant quelquefois faire mourir nos meilleurs compagnon, je pense par exemple à mon chien Félix qui vit avec moi depuis 12 ans ! Cette éventualité me fait horreur, comment pourrait- on l’envisager pour un parent, ou un ami qu’on aime ?

Et ce n’est pas le rituel d’accompagnement du Père Ringlet qui changera quoique ce soit au caractère homicide d’un tel acte. Je relève d’ailleurs selon son propre témoignage que ce sont les équipes médicales pratiquant l’euthanasie qui lui ont demandé ce genre de rituel. Inconsciemment ces gens ne voudraient-ils pas se faire pardonner quelque chose ? Il aura beau alors mélanger ses huiles avec « tous les parfums d’Arabie » les plus précieux, ils accompagneront un meurtre. C’est d’ailleurs une des raisons pour laquelle le Magistère exclut tout acte pastoral en de pareilles circonstances, comme je le préciserai pour conclure. Le Père Ringlet ne dissimule rien de sa pensée contrairement à Soeur Véronique Margron, auteur de la préface du livre dont lui a écrit la postface. Bien qu’elle se montre apparemment écartelée entre son « éthique de la détresse » et son « éthique de la promesse », elle est alors à l’époque où elle déclinait ses paradoxes, confortablement assise dans le fauteuil de Prieure provinciale des Sœurs de la charité dominicaines de la Présentation, (2014) et maintenant Présidente de la CORREF. Se placer en première ligne pour dénoncer des abus sexuels dans l’Eglise, ce qui est louable, implique le même zèle pour défendre les personnes fragiles, ceux qui sont souffrants aux portes de la mort ! Sous une neutralité naïve qu’elle manifeste par un ensemble de « questions sans réponses », lesquelles prédisposent à absoudre l’acte d’euthanasie (particulièrement dans le paragraphe qu’elle intitule « Pour l’éthique que penser ? »), je lis dans cette préface des propos qui relèvent de la langue de buis, la même qui, tout en donnant quelquefois du galon vide les sanctuaires et les couvent. C’est dire d’emblée que le combat contre ce projet de loi sera difficile. Une fois de plus dans ses combats éthiques en France, l’Eglise catholique sera trahie de l’intérieur, comme elle le fut pour l’avortement en 1974. J’ai fait partie dès 1971 de l’Association Nationale pour l’étude de l’avortement comme pasteur luthérien aux côtés du pasteur André Dumas, réformé et professeur d’éthique à la Faculté libre de théologie protestante dont je fus l’étudiant. Et nous avions en face de nous, un père jésuite Philippe Julien, le Père René Simon, un des grands spécialistes catholiques de l’éthique à l’époque, les dominicains Jacques Pohier, Bernard Quelquejeu, et Albert Pie et l’abbé Marc Oraison. J’étais beaucoup plus réservé sur les cas possibles d’avortements que mon maître André Dumas, alors que j’aurais dû totalement m’y opposer, je le reconnais bien volontiers. Je l’ai fait savoir par la suite, avant de quitter le protestantisme, qui d’ailleurs était loin d’être unanime sur la question. Je fus critiqué, et c’était juste, pour mon « libéralisme » dès 1971. Mais à la grande surprise d’André Dumas, comme à la mienne, nos confrères catholiques de la commission allaient beaucoup plus loin que nous, sans s’attirer des reproches clairs de l’épiscopat de cette époque…il faudra attendre. La bataille législative fut perdue en 1974, et reperdue en 1979, au moment du réexamen de la loi. Là j’avais ouvertement conseillé de voter contre, car il était alors pour moi évident que cette loi avait poussé les gens à considérer l’avortement comme un moyen supplémentaire de contraception, ce qu’elle n’était pas aux yeux de Madame Veil. De plus, elle était très mal appliquée, en particulier par l’omission systématique des entretiens psychologiques préalables prévus par le texte de 1974, car je rappelle que dans son discours à
l’assemblée nationale, Simone Veil, présenta toujours la demande d’avortement comme un acte d’expression de détresse de femmes, et jamais comme un droit ! Autant dire que pour l’euthanasie, je ne me fais pas beaucoup d’illusions. Certes nous ne sommes plus dans les années de la « chape de plomb » ( 1970-1980) pour reprendre une expression d’un de nos grands prélats français, mais le pouvoir des médias a considérablement augmenté, tout comme leur fâcheuse tendance à la pensée unique. On censure davantage aujourd’hui que dans les années 70/80, et ce, dans tous les médias sans aucune exception ! Aussi, sans y ajouter un seul commentaire, je conclurai par quelques courts extraits du document « Le bon samaritain » de la Congrégation pour la doctrine de la foi publié le 22 septembre 2020, qui a reçu l’approbation du Pape François, et qui selon moi appellent et appelleront des réactions concrètes de l’Eglise, ( rappels à la discipline doctrinale, sacramentelle, etc…faute de quoi je crains qu’elle n’ait plus rien à dire pour un moment sur le plan sociétal et se suicide dans sa structure actuelle, et ce, sans besoin d’assistance !

« L’Eglise considère qu’il est nécessaire de réaffirmer comme enseignement définitif que l’euthanasie est un crime contre la vie humaine parce que, par un tel acte, l’homme choisit de causer directement la mort d’un autre être humain innocent…Ceux qui adoptent des lois sur l’euthanasie et le suicide assisté sont donc complices du grave péché que d’autres commettront. Ils sont également coupables de scandale car ces lois contribuent à déformer la conscience même des fidèles…Les lois qui légalisent l’euthanasie…affectent le fondement de l’ordre juridique : le droit à la vie, qui soutient tout autre droit, y compris l’exercice de la liberté humaine. L’existence de ces lois nuit profondément aux relations humaines, à la justice et menace la confiance mutuelle entre les hommes…

Les soins palliatifs sont l’expression la plus authentique de l’action humaine et chrétienne d’assistance, le symbole tangible d’un « être » compatissant aux côtés de ceux qui souffrent. L’expérience montre que l’application de soins palliatifs réduit considérablement le nombre de personnes réclamant une euthanasie… Aucun geste extérieur n’est admissible de la part de ceux qui assistent spirituellement ces personnes malades qui puisse être interprété comme une approbation de l’acte euthanasique, comme par exemple rester présent au moment de sa réalisation. Une telle présence ne peut être interprétée que comme une complicité. »

Que Dieu nous soit en aide ! »

Site source :

Michel Viot wordpress


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