Euthanasie : la manipulation des mots

mardi 27 décembre 2022
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Euthanasie : la manipulation des mots

« Depuis plusieurs semaines, à la demande d’Agnès Firmin-Le Bodo, ministre délégué auprès du ministre de la Santé, un comité « d’experts » planche sur une réflexion lexicale sur la fin de vie. L’objectif ? Adoucir et neutraliser le débat à venir. Face à ce combat lexical, les opposants à l’euthanasie appellent à la vigilance.
Un flou sémantique

« Ce n’est pas la première fois que je remarque combien, en France particulièrement, les mots ont plus d’empire que les idées. » Alors que s’ouvre le débat sur la légalisation ou non de l’euthanasie, les mots de George Sand sont d’une étonnante actualité. Missionnés par Agnès Firmin-Le Bodo, ministre délégué en charge de l’Organisation territoriale et des Professions de santé, des experts – écrivains, professionnels de santé et juristes - travaillent à l’élaboration d’un lexique sur la fin de vie. L’objectif affiché : expliquer aux Français les termes et expressions du débat comme « suicide assisté », « aide active à mourir », « sédation profonde »… Mais derrière cette visée pédagogique se cache un autre objectif non avoué : adoucir la terminologie, la rendre plus neutre voire la dénaturer pour rendre impossible tout débat.

Tout d’abord, le mot « euthanasie », pourtant pièce maîtresse du débat à venir, semble poser particulièrement problème. Emmanuel Macron lui-même reconnaissait, après une visite pontificale, « ne pas aimer le mot euthanasie ». Olivier Véran, porte-parole du gouvernement, confiait à son tour, sur le plateau de France 2 : « Le mot "euthanasie" n’est pas un joli mot. C’est un mot qui est connoté dans la langue française. » Plutôt que d’employer la terminologie exacte – euthanasie signifie littéralement, selon le site du Sénat, « l’administration délibérée de substances létales dans l’intention de provoquer la mort » -, l’exécutif privilégie désormais l’expression plus floue mais moins cruelle de « fin de vie ». L’autre terme qui inquiète les partisans d’une légalisation de l’euthanasie est celui de « suicide ». Le Comité consultatif national d’éthique (CCNE) relevait ainsi, dans son avis 139, « la charge émotionnelle négative qui est rattachée à ce terme ». Et d’ajouter que même si « le suicide assisté constitue bel et bien un suicide », rien n’oblige « nécessairement à le qualifier comme tel ». Autrement dit, le CCNE se soumet à des revendications militantes et accepte de dénaturer le lexique de l’euthanasie. Le flou sémantique ainsi créé inquiète les opposants à une légalisation de l’euthanasie. Tugdual Derville, délégué général d’Alliance VITA, appelle à la vigilance face à cette novlangue qui est en train de voir le jour. Malgré ce nouveau lexique aseptisé, la réalité restera la même : l’euthanasie se généralisera et la France connaîtra les mêmes dérives que son voisin belge.

- Un lexique aux mains de militants

Ce nouveau lexique inquiète d’autant plus que, si le ministère de la Santé assure respecter « un pluralisme d’opinions » (Le Monde), force est de constater l’orientation militante de certains de ses membres. Mené par l’académicien Erik Orsenna, ce comité d’experts compte dix membres engagés sur les questions de fin de vie. On trouve ainsi la sœur de Lionel Jospin, Noëlle Châtelet, écrivain et fille de la cofondatrice de l’Association pour mourir dans la dignité (ADMD), qui est ouvertement favorable à l’euthanasie. De même que Martine Lombard, juriste, qui appelle, elle aussi, à une légalisation de l’euthanasie. Après avoir lancé une convention citoyenne dont les conclusions du gouvernement sont déjà connues, l’exécutif souhaite donc créer un lexique dont on soupçonne l’orientation. « La bataille des mots de la fin de vie est déclenchée. Si nous laissons faire, en toute logique, prononcer le mot euthanasie nous sera interdit explicitement ou implicitement », avertit Tugdual Derville sur son compte Twitter.

Peu importe les périphrases que le gouvernement emploiera, avec cette bataille des mots, il tentera d’empêcher tout débat. Car comme l’écrivait George Orwell dans son livre prophétique 1984, « nous détruisons chaque jour des mots. Nous taillons le langage jusqu’à l’os. À la fin, nous rendrons littéralement impossible le crime par la pensée, car il n’y aura plus de mots pour l’exprimer. » »

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bvoltaire


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