Questionnements autour de débats internes à l’Eglise

lundi 5 juin 2023
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Questionnements autour de débats internes à l’Eglise

« Article de Robert Morrison paru le 22 mai 2023 sur The Remnant sous le titre : How Have Vatican II’s Ecumenical Wagers Against the Blessed Virgin Mary Panned Out ?
(Traduit à l’aide de deepl.com)

"Je fais campagne, AUTANT QUE JE LE PEUX, contre une consécration du monde au Cœur Immaculé de Marie car je vois le danger que se forme un mouvement dans ce sens." (Yves Congar, Mon journal du Concile, article du 17 septembre 1964)

Qu’est-ce qui, aux yeux d’Yves Congar, était si dangereux dans la consécration du monde au Cœur Immaculé de Marie ? Comme nous pouvons le discerner dans la désolation qu’il a exprimée après la déclaration de Paul VI sur la Vierge Marie comme "Mater Ecclesiæ" (Mère de l’Église), il craignait que toute "dévotion excessive" à Notre-Dame ne mette en péril ce qu’il considérait comme l’objectif principal du Concile, à savoir la promotion de l’œcuménisme :

"Les observateurs [non catholiques] ont une très mauvaise impression de ces deux derniers jours et de cet acte final. Ils ont vu, et nous avons vu avec eux, qu’on n’avait pas tenu compte d’eux, qu’on n’avait pas respecté les exigences d’une véritable sensibilité œcuménique. Cullmann a dit : ’Il faudra deux générations pour effacer cela et le faire oublier’ ". (Congar, Mon journal du Concile, article du 22 novembre 1964)

Il est stupéfiant de constater que Congar - qui plus tard sera nommé cardinal par Jean-Paul II et qui a été une source d’inspiration pour le Synode sur la Synodalité - a été bouleversé de voir Paul VI déclarer que Notre-Dame est la Mère de l’Église. Il était d’accord avec le professeur Oscar Cullmann, un luthérien, pour dire que cette déclaration dérangerait les protestants.

Que pensait le professeur Cullmann de la Vierge Marie ? Tout d’abord, nous pouvons considérer ce qu’il acceptait de nos croyances catholiques :
"Quant aux éléments de la doctrine et de la piété catholiques romaines concernant Marie qui sont acceptables ou inacceptables, je peux accepter que les catholiques parlent de l’élection de Marie comme ’bénie entre toutes les femmes’, de son humilité, de sa foi, de sa douleur devant la croix." (Oscar Cullmann, Vatican II : The New Direction, p. 51)

Bien sûr, il était présomptueux et arrogant de sa part de parler de ce qu’il pouvait accepter des vérités de l’Église concernant Notre-Dame, mais, pour être juste envers Cullmann, Jean XXIII lui avait accordé, ainsi qu’aux autres observateurs non-catholiques, des postes d’influence au Concile. Si, aux yeux de Jean XXIII, le but premier du Concile était de parvenir à l’unité des chrétiens, il était logique de découvrir ce que les observateurs non-catholiques pouvaient accepter au sujet du catholicisme.

En ce qui concerne les choses que Cullmann ne pouvait pas accepter au sujet de la mariologie, nous pouvons extraire ses diverses objections à la dévotion catholique de la Vierge en un seul argument général :
Il me semble certain que la reconnaissance de Marie comme instrument élu de Dieu ne peut justifier une "mariologie" ou un culte "marial". Il n’est pas possible d’avoir une mariologie à côté d’une christologie, pas plus qu’il n’est possible d’avoir une ’pétrologie’, en dépit de la place importante que Pierre occupe dans l’histoire du salut... " (Cullmann, Vatican II). "(Cullmann, Vatican II : The New Direction, pp. 51-52).

Cullmann pouvait accepter les bonnes choses dites sur Notre-Dame dans les Évangiles, mais tout ce qui allait au-delà devait être rejeté. C’est pourquoi Congar et lui ont été dévastés par la déclaration de Paul VI selon laquelle la Vierge Marie est la Mère de l’Église.
Mais le Concile n’a pas été totalement une défaite pour Cullmann et pour ceux qui voulaient rendre le catholicisme plus acceptable pour les protestants. Par exemple, il a fait l’éloge de la majorité des Pères du Concile qui ont voté contre un schéma séparé sur la Sainte Vierge Marie :

"Le débat conciliaire jusqu’à présent a plutôt prouvé qu’une majorité des pères du Concile s’est engagée à empêcher tout développement sur la mariologie et le culte de Marie. En exigeant que l’on ne parle de Marie que dans le texte ’De l’Église’ et non, comme l’opposition l’aurait souhaité, dans un texte indépendant, la majorité a clairement manifesté son intention de ne plus parler de Marie qu’en dépendance directe du Christ". (Cullmann, Vatican II : The New Direction, p. 52)

Ce fut l’un des paris les plus significatifs contre la Vierge Marie : au nom de la promotion des intérêts œcuméniques, la majorité des Pères du Concile a décidé de ne pas honorer la Vierge avec un schéma séparé. Voici comment Congar décrit une escarmouche importante de cette bataille, lorsque le grand héros de la tradition catholique, le cardinal Alfredo Ottaviani, a perdu le vote pour un schéma séparé ("extra-schéma") par une marge étroite au sein de la Commission théologique :
"Le cardinal Ottaviani a dit : Si le Père Général (Fernandez) était resté jusqu’à la fin et avait voté, nous aurions eu une voix de plus en faveur du ’schéma supplémentaire’. J’ai dit : "Est-ce la Providence ou le diable ?" Ce fut une grande et importante réunion du point de vue de l’orientation future des choses. Ce qui s’est joué ce soir, c’est en partie l’ouverture vers l’homme (De populo Dei) et la solidité d’une mariologie guérie de son chancre maximaliste". (Congar, Mon Journal du Concile, entrée du 10 octobre 1963)

Ainsi, la recommandation de la Commission théologique était d’inclure le texte sur Notre-Dame dans le schéma sur l’Église (au lieu d’avoir un schéma séparé). C’était un vote en faveur de l’œcuménisme et en faveur de la "guérison de la mariologie de son chancre maximaliste" ; et Congar se demandait si c’était la Providence ou le diable qui en avait décidé ainsi.

Fin octobre 1963, la question est soumise au vote de l’ensemble des Pères conciliaires (Congrégation générale). Dans son ouvrage classique, Le Rhin se jette dans le Tibre - Le Concile inconnu, le père Ralph M. Wiltgen cite l’argument de l’évêque servite, Giocondo Grotti, en faveur d’un schéma séparé :

Mgr Grotti a ensuite posé la question suivante : "L’œcuménisme consiste-t-il à confesser ou à cacher la vérité ? Le Concile doit-il expliquer la doctrine catholique ou la doctrine de nos frères séparés ? Cacher la vérité nous fait du tort à nous et à ceux qui sont séparés de nous. Elle nous blesse, parce que nous apparaissons comme des hypocrites. Elle blesse ceux qui sont séparés de nous parce qu’elle les fait paraître faibles et capables d’être offensés par la vérité". L’évêque Grotti a conclu sa réfutation par un plaidoyer : "Séparons les schémas. Professons notre foi ouvertement. Soyons les maîtres que nous sommes dans l’Église en enseignant avec clarté et en ne cachant pas ce qui est vrai".

Ces paroles sacrées nous en disent long, non seulement sur les débats concernant la Vierge, mais aussi sur l’ensemble des efforts malheureux du Concile pour unir les chrétiens en abandonnant les vérités immuables de l’Église. Ses arguments étaient corrects à l’époque, et ils le sont encore aujourd’hui. En fin de compte, cependant, la majorité des Pères du Concile voyait les choses différemment : 1 114 ont voté en faveur de l’inclusion du texte sur la Vierge dans le schéma sur l’Église, 1 074 ont voté en faveur d’un schéma séparé pour la Vierge.

Les partisans d’un masquage de la vérité catholique pour promouvoir l’œcuménisme ont également réussi à s’opposer aux efforts visant à déclarer Notre-Dame "médiatrice de toutes les grâces". Dans son ouvrage Theological Highlights of Vatican II, le cardinal Joesph Ratzinger a discuté de la décision sur le schéma séparé, ainsi que du contenu du texte sur la Vierge :

"Ce fut sans aucun doute une décision explicitement œcuménique lorsque le Concile décida, à l’automne 1964, d’incorporer le schéma sur Marie en tant que chapitre du schéma sur l’Église... Dans le texte, qui remplaçait un projet antérieur, l’ancienne mariologie systématique a été dans une large mesure (mais pas complètement) supplantée par une mariologie positive et scripturaire. La spéculation a été remplacée par une recherche sur les événements de l’histoire du salut, qui ont été interprétés à la lumière de la foi. L’idée de Marie comme "co-rédemptrice" a disparu, tout comme celle de Marie "médiatrice de toutes les grâces". Le texte conserve encore un vestige de ce dernier titre lorsqu’il dit que la coutume s’est développée dans l’Église de s’adresser à Marie en tant que médiatrice ainsi qu’avec d’autres titres, mais cela est sans aucun doute très différent de dire qu’elle est médiatrice de toutes les grâces".

Comme le futur Benoît XVI l’a décrit en l’approuvant, la majorité des pères du Concile a pris "une décision explicitement œcuménique" pour rejeter l’idée d’honorer Notre-Dame comme "médiatrice de toutes les grâces".

Pourquoi, pouvons-nous nous demander, les Pères progressistes du Concile n’ont-ils pas essayé de faire plus pour diminuer la Mariologie afin de répondre aux désirs du Professeur Cullmann et d’autres non-catholiques ? Dans l’une des déclarations les plus révélatrices de son Journal du Concile, Congar a décrit le risque d’aller trop loin :
"J’y ai vu un drame que j’ai vécu toute ma vie. La nécessité de lutter, au nom de l’Évangile et de la foi apostolique, contre un développement, une prolifération méditerranéenne et irlandaise, d’une mariologie qui ne vient pas de la Révélation, mais qui est soutenue par des textes pontificaux... Nous nous disons qu’il ne faut pas être TROP antagoniste, de peur de provoquer pire que ce que nous voulons éviter". (Congar, Mon Journal du Concile, article du 22 septembre 1961)

Ils étaient impies mais prudents - ils voulaient démolir la Mariologie autant que possible, mais ils savaient que s’ils étaient trop agressifs, ils auraient mis en péril tout leur programme. Nous pouvons appliquer ce même aveu de Congar à l’ensemble de l’assaut progressiste contre la tradition catholique lors du Concile.

Pour leurs efforts, la majorité des Pères du Concile qui ont parié contre Notre-Dame ont reçu les éloges et l’appréciation du professeur Cullmann :

"Nous devrions nous réjouir sincèrement de l’attitude de ces pères et du fait qu’ils ont obtenu un vote majoritaire. Si la majorité a été très faible dans ce cas, plus faible que dans les votes sur d’autres questions, cela prouve non seulement l’immense pression exercée sur le Concile, mais aussi le fait qu’il ne s’agit pas seulement d’un problème théologique, mais d’un problème de dévotion dans lequel les éléments émotionnels jouent un rôle important". (Cullmann, Vatican II : The New Direction, pp. 52-53)

Aussi gratifiant qu’ait dû être l’éloge d’un professeur luthérien, nous avons raison de nous demander quelles autres "victoires" ces Pères du Concile ont remportées pour l’Église grâce à leurs efforts pour diminuer la Mariologie. Avons-nous vu un grand afflux de protestants dans l’Église ? Avons-nous vu une grande augmentation de la sainteté catholique ? Non - tout ce que nous avons vu, c’est une apostasie, une corruption, une laideur et une absurdité sans précédent parmi les catholiques qui ont suivi l’esprit œcuménique de Vatican II. La majorité des Pères du Concile a parié contre la Sainte Vierge Marie, et la quasi-totalité du monde entier a perdu,

Mais tous les catholiques n’ont pas abandonné la tradition catholique et Notre-Dame. Ceux qui sont restés fidèles continuent à porter de grands fruits aujourd’hui. Alors que les églises catholiques du monde entier continuent de fermer ou de tomber entre les mains des hérétiques, la Fraternité Saint-Pie X a récemment consacré l’église de la glorieuse Immaculée à St. Marys, Kansas. L’abbé David Nix a décrit la nouvelle Immaculée comme une représentation de l’espoir que nous avons pour le triomphe du Cœur Immaculé de Marie, lorsque la destruction causée par Congar et ses collègues aura été finalement surmontée :

"La gloire et la beauté de cette église représentent [...] l’espoir que nous avons du triomphe du Cœur Immaculé de Marie pour que l’ensemble de l’Église catholique revienne à Jésus-Christ au lieu du modernisme. Notre Dame du Bon Succès a prophétisé qu’il s’agirait de la "restauration complète" de l’Église. En fait, elle a exactement prédit une période de destruction des sacrements au XXe siècle. Mais après l’incendie, l’Église reviendrait avec une gloire bien plus grande qu’elle ne l’a jamais été avant la mutinerie du modernisme qui a tenté de la détruire. C’est, je crois, ce qui est déjà représenté (et peut-être même prédit) dans la glorieuse et nouvelle église de l’Immaculée de St. Marys, Kansas.

Cette nouvelle Immaculée est un phare pour ceux qui cherchent encore la vérité et la grâce de Dieu dans un monde qui ressent de plus en plus les conséquences dévastatrices des efforts de Vatican II pour rendre l’Église plus accessible aux non-catholiques. »

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