« Où sont les grands hommes d’Etat Français ? »

vendredi 30 octobre 2015
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« Où sont les grands hommes d’Etat Français ? »



« De retour de Damas, où il a rencontré pour la deuxième fois — avec les députés Xavier Breton et Véronique Besse — le président syrien, Bachar al-Assad, Jean-Frédéric Poisson se dit « remonté » contre « l’aveuglement dont la France fait preuve ».

Le président du Parti chrétien-démocrate (PCD), candidat à la primaire de la droite et du centre, a confié à Valeurs actuelles s’être rendu en Syrie « parce que personne n’a le courage de le faire » : « Ce qui se passe [là-bas] concerne très directement la France, je n’ai plus confiance dans les politiques français de gauche comme de droite pour apporter une solution », assure-t-il. S’il a décidé d’aller à la rencontre du chef de l’État syrien, c’est aussi pour rappeler à l’opinion publique française qu’il « faut parler avec Bachar pour résoudre la crise et la transition démocratique ».
VA. Vous êtes candidat à la primaire des Républicains et député d’opposition, pourquoi êtes-vous allé en Syrie ?

JFP. Je suis allé en Syrie parce que ce qui s’y passe concerne très directement la France. Je n’ai plus confiance dans les politiques Français de gauche comme de droite pour apporter une solution. Je prends mes responsabilités de parlementaire et de président de parti politique et j’assume de dire la vérité aux Français. La paix sociale est aujourd’hui menacée en France comme dans le reste de l’Europe. Ce conflit est mal engagé, la France est entrée dans un jeu d’alliances mortifères qui la met en risque et la conduit à sacrifier ses intérêts de peur de mécontenter ses amis américains. La paix et la prospérité nationales se jouent en ce moment au Moyen Orient. Si on ne sort pas de la crise Syrienne, la France paiera la note. Cela a déjà commencé avec ce qu’on appelle abusivement la crise des migrants qui est en réalité, une crise de la vision diplomatique des Français dans cette région du monde.

VA. Vous avez aussi rencontré Bachar el-Assad… pour la seconde fois

JFP. Oui et je dénonce comme une absurdité le refus de la France de discuter avec lui alors qu’il est un point d’appui indispensable pour battre Daesch en Syrie. Je le répète cela doit être notre principal objectif. La France doit retrouver son poids diplomatique pour résoudre cette crise dans laquelle ses intérêts vitaux sont en jeu. Nous devons donc rétablir la relation diplomatique entre la France et la Syrie qui a été interrompue par Nicolas Sarkozy et réinstaller une représentation française officielle à Damas. Sans cela la France restera hors jeu.
VA. Que vous a-t-il dit ?

JFP. Il veut continuer à croire que la France est pour la Syrie une passerelle vers l’Europe. Des élections législatives devraient être organisées en mai prochain sur le sol syrien, il a lui même proposé qu’une délégation internationale à laquelle la France pourrait prendre part veille au bon déroulement du scrutin.

Son message à la France est le suivant : « Ne soutenez pas Bachar El Assad si vous ne le voulez pas mais battez vous contre le terrorisme pour de vrai ! Où sont les grands hommes d’Etat Français ? » En ce qui concerne notre visite, il a reconnu : « Vous n’êtes pas venu en Syrie parce que vous êtes d’accord avec moi politiquement mais parce que vous voulez comprendre notre situation ».

VA. Quels enseignements faites-vous pour la France ?

JFP. D’abord le moment est venu d’une clarification nette sur la position de la France dans la région. Ma conviction est que nous n’avons pas encore tout mis en œuvre pour lutter contre l’Etat islamique, et que les français, comme d’ailleurs les syriens, attendent un engagement plus ferme, plus visible, plus efficace.

Ensuite, le rapprochement avec la Russie devient une nécessité. La très grave faute politique de François Hollande, déclarant il y a quelques jours que « la Russie n’est pas notre allié en Syrie » doit impérativement être réparée. Les Russes travaillent en ce moment à joindre leurs efforts à ceux de la coalition occidentale : cet effort doit être soutenu par la France, sans réserve.

Enfin, il est plus que temps de définir une ligne politique claire de la France à l’égard d’un certain nombre de ses alliés, qui deviennent plus que gênants. Le suivisme dont le Gouvernement Français fait preuve à l’égard des Saoudiens est insupportable, surtout lorsqu’on connaît l’activisme de l’Arabie Saoudite dans le soutien aux organisations islamistes partout dans le monde. La complaisance à l’égard de l’ambiguïté des Turcs, ou de l’argent des monarchies pétrolières du golfe provoque une grande incompréhension chez tous nos amis du Moyen-Orient. Tout cela doit cesser, et la France doit prendre impérativement ses distances à l’égard de ces pays.

Assad est en fait le seul aujourd’hui à pouvoir garantir la protection des chrétiens dans son pays. Il le constate d’ailleurs lui-même : « si le fondamentalisme islamiste n’a jamais réussi à s’implanter en Syrie, c’est grâce à la présence des chrétiens. SI un jour ils devaient tous quitter la Syrie, le fanatisme s’installerait durablement ». Autant dire que la politique des occidentaux qui ne fait rien pour permettre aux Syriens de rester chez eux est suicidaire, pour la Syrie comme pour la France et pour l’Europe. »

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valeurs actuelles