Karim Ouchikh : « il nous faut enfin reconnaître l’existence d’une prééminence du fait chrétien dans notre Pays »
« Président du SIEL (Souveraineté, Identité Et Libertés), administrateur national du RBM, Conseiller Regional Île-de-France et Conseiller municipal de Gonesse (95), Karim Ouchikh a créé au mois de septembre l’association SOS Églises de France. Il a bien voulu répondre aux questions du Rouge & Le Noir.
R&N : Quels sont les buts de l’association SOS Églises de France que vous venez de lancer ?
Karim Ouchikh : L’association SOS Eglises de France a été fondée en septembre 2016, lors des Journées du patrimoine, avec l’objectif de mettre un terme à la disparition programmé de notre patrimoine chrétien, lequel s’efface peu à peu de nos horizons quotidiens : laissées à l’abandon, vendues ou détruites, les églises et chapelles de France se meurent inexorablement. Il s’agit là d’un authentique combat de civilisation qu’il nous appartient de relever collectivement en nous hissant à hauteur de ce défi culturel inédit. Autrement dit, il s’agit moins d’ambitionner de sauver l’intégralité de nos églises menacées (une entreprise gigantesque !) que de mobiliser l’opinion publique d’un point de vue politique.
SOS Eglises de France se propose donc de constituer un groupe de pression politique puissant, au sens noble du terme, agissant auprès de tous nos élus, avec cette idée d’acclimater dans notre droit un concept métapolitique que j’ai forgé pour les besoins de ce combat : la servitude de civilisation. Avec notre patrimoine monumental chrétien, nous bénéficions d’un héritage insigne qu’il nous appartient d’entretenir précieusement et de valoriser avec discernement pour mieux le transmettre aux générations futures : une servitude de civilisation pèse donc sur les collectivités, mais aussi sur les diocèses et les propriétaires privés d’édifices chrétiens, obligeant les uns comme les autres à entretenir scrupuleusement ce patrimoine considérable, quitte pour les pouvoirs publics à dégager des moyens financiers supplémentaires pour l’entretien de ce patrimoine.
Un groupe de travail de juristes se penche sur la question pour aboutir très rapidement à sécuriser juridiquement cette notion nouvelle. Dans cet ordre d’idée, j’entends bientôt interroger les candidats aux élections présidentielles et aux législatives pour placer cet enjeu de civilisation au cœur des débats électoraux à venir.
R&N : D’autres associations, souvent locales, se mobilisent déjà pour sauver tel ou tel élément de notre patrimoine architectural chrétien. Comment travailler en bonne intelligence avec toutes ces associations déjà existantes ?
Karim Ouchikh : SOS Eglises de France aura vocation à servir aussi de caisse de résonance à toutes les actions menées localement par les associations qui se battent avec abnégation et constance pour préserver leur patrimoine religieux. Les fonds collectés par SOS Eglises de France seront également utilisés à soutenir des opérations ciblées de sauvetage, de conservation ou de préservation des édifices cultuels chrétiens. C’est bien pourquoi, je profite de vos colonnes pour faire un appel à la générosité de vos lecteurs qui peuvent adhérer à cette association et/ou nous faire un don. Par ailleurs, j’entends bien agir de concert avec les associations nationales et sites internet de référence (Observatoire du Patrimoine Religieux, Patrimoine en blog, Clochers en péril…) qui œuvrent depuis des années avec talent en ce domaine.
R&N : Vous déclarez que certaines églises sont démolies volontairement et dénoncez un mode opératoire bien connu. Faut-il y voir une volonté réelle de certaines personnes de faire disparaître, pour différents motifs, une partie du patrimoine chrétien français ?
Karim Ouchikh : Je dénonce moins une volonté programmée des différents acteurs concernés (pouvoirs publics, diocèses, propriétaires privés…) de vouloir faire disparaître méthodiquement notre patrimoine cultuel que leur inertie, leur manque de bonne volonté et leur indifférence coupables. Le processus est malheureusement bien connu : faute de crédits d’entretien, les travaux élémentaires permettant la conservation d’une église ne sont pas réalisés, ce qui provoque une lente dégradation de l’édifice ; celui-ci s’abîme au point de provoquer des risques pour la sécurité des biens et des personnes ; des arrêtés de péril sont pris par les autorités communales ; l’église est alors fermée puis désacralisée avant d’être vendue à un promoteur immobilier ou promise à la démolition…C’est bien cette mécanique infernale que j’entends enrayer en faisant admettre à nos pouvoirs publics la valeur irremplaçable de notre patrimoine religieux et la nécessité historique de préserver ce marqueur identitaire de premier plan. En un mot comme en cent, un plan Marshall pour financer la sauvegarde de nos églises et un réarmement législatif pour en garantir juridiquement leur protection doivent très rapidement s’imposer dans notre paysage politique.
R&N : Le patrimoine chrétien se dégrade et disparaît. N’est-ce finalement pas une disparition normale du fait de la disparition progressive de la foi et de la culture chrétienne en France ?
Karim Ouchikh : La dégradation et la disparition de notre patrimoine chrétien est un phénomène qui tend d’autant plus à s’intensifier que nos édifices cultuels ont de plus en plus de mal à trouver des prêtres pour les desservir et des fidèles pour les ‘’animer’’ spirituellement. Mais à cette réalité sociologique douloureuse, j’oppose cette espérance : le redressement spirituel et moral de la France qui se produira sous peu amènera nos compatriotes à retrouver bientôt le chemin de nos églises. Aux responsables politiques et associatifs, il appartient donc de garder d’ici là nos lieux de culte parfaitement intacts. La sanctuarisation spirituelle de nos édifices chrétiens est un devoir culturel qui aura certes un coût pour les finances de la Nation mais qui me paraît devoir être consenti sans aucune mesure au regard des bienfaits inestimables que nous en tirerons le moment venu pour consolider le Bien commun, à une époque où les esprits sont passablement désorientés par la crise identitaire à laquelle la France est en proie depuis bien des années.
R&N : Faut-il faire évoluer la loi de 1905 sur la séparation de l’Église et de l’État ? Si oui, comment ?
Karim Ouchikh : Si la Nation doit consentir des sacrifices inédits pour préserver nos églises, c’est bien parce qu’il nous faut enfin reconnaître l’existence d’une prééminence du fait chrétien dans notre pays. Je veux absolument acclimater cette réalité de civilisation dans le débat des idées pour réenchanter un modèle de société aujourd’hui à bout de souffle. Nos compatriotes s’interrogent sur la nature du lien profond qui fonde notre appartenance commune : la laïcité qui est un principe d’organisation des pouvoirs publics, a été si mal interprétée dans le débat des idées que l’opinion dominante tend désormais à vouloir reléguer l’expression des religions dans la stricte sphère privée, circonstance de nature à créer un vide spirituel considérable dans lequel prospère par ailleurs un islam décomplexé dont les pratiques de vie sont radicalement contraires à notre modèle de civilisation.
Sans vouloir établir en France un Etat confessionnel, la religion chrétienne doit retrouver à mes yeux un poids de civilisation qui permettra à nos compatriotes de retrouver leurs marques culturelles de toujours. Une telle transformation en profondeur ne peut s’opérer sans une mutation radicale du principe de laïcité, ce qui suppose d’inscrire enfin dans le préambule de notre Constitution l’existence de nos racines chrétiennes et sans doute d’adapter significativement la loi de 1905, laquelle devra en effet imposer à l’avenir une préférence chrétienne dans l’organisation des cultes en France. »