« La caractéristique essentielle de l’école catholique qui doit être toujours respectée : ordonner toute la culture humaine à l’annonce du Salut de telle sorte que la connaissance graduelle que les élèves acquièrent du monde, de la vie et de l’homme, soit illuminée par la vraie foi »
L’UNAPEL (1) a outrepassé sa mission en soutenant la réforme du collège sans la moindre consultation des parents :
« En désaccord avec les prises de position du bureau national plébiscitant la réforme du collège, l’Apel des Maristes, un des plus gros établissements lyonnais, a suspendu provisoirement ses liens avec lui. Une alerte inédite, destinée à susciter plus de dialogue en interne. Enquête et réactions.
La décision a été prise après un vote massif des parents de l’Apel locale, lors d’une assemblée qui a réuni plusieurs centaines d’entre eux début septembre. Dans la salle, cinq présidents d’Apel de Lyon et sa région étaient venus pour voir. Et visiblement, personne n’a été emballé par les explications de Christophe Abraham, le secrétaire général adjoint de l’Apel nationale venu dans l’urgence répondre aux questions. Que s’est-il passé ?
Comme en atteste le communiqué de presse rédigé par la direction de l’Apel des Maristes, il s’agit d’une suspension provisoire des liens statutaires avec le bureau national. « Il est ressorti du vote des adhérents que l’UNAPEL (1) a outrepassé sa mission en soutenant la réforme du collège sans la moindre consultation des parents, explique Philippe Laporte, le président de l’Apel de Sainte-Marie Lyon. Mais aussi sans faire la vérité sur les implications profondes de celle-ci et ce, malgré l’intensité du débat public et l’indignation d’autorités les plus reconnues. Et en acceptant sans protester la violence d’un décret au mépris des principes élémentaires du débat démocratique et parlementaire. » Il tient aussi à rappeler l’attachement des parents à l’Enseignement catholique et leur souhait de « retrouver au plus vite une Apel à l’écoute de ses adhérents ».
Il est ressorti du vote des adhérents que l’UNAPEL a outrepassé sa mission en soutenant la réforme du collège sans la moindre consultation des parents.
Enseignant en Lettres au Lycée Sainte-Marie de Lyon, père de trois enfants dans l’établissement, et cotisant à l’Apel, Olivier Gosset a voté la suspension comme les autres parents, « car je suis en désaccord avec la position prise par l’Apel au sujet de la réforme du collège » dit-il. Alors que celle-ci était à peine engagée, l’association déclarait, dès mars 2015, « [accueillir] avec beaucoup d’espoir la volonté de Najat-Vallaud Belkacem de réorganiser le collège suite à son projet de réforme présenté en Conseil des ministres ».
« Je pense pour ma part, précise Olivier Gosset, que cette réforme induit un appauvrissement considérable des savoirs enseignés, qu’elle signe la disparition de parcours diversifiés de qualité et qu’elle n’avait pas – étant donné son ampleur et ses conséquences – à être promulguée comme elle le fut par simple décret. En outre, j’estime que l’Apel, ayant pris à la hâte cette position, usurpe sa qualité d’association représentante et prend la place du parent que je suis dans l’éducation que j’espère offrir – via l’institution scolaire – à mes enfants. J’aurais aimé qu’en la matière l’Apel fît preuve de consultation, de propositions, voire d’opposition. J’aurais aussi aimé qu’elle ne déroge point au principe élémentaire de subsidiarité : dans l’espace public, une parole ou une action doivent être confiées à la plus petite entité capable de les mettre en œuvre. Représenter n’est pas remplacer. »
Dans l’espace public, une parole ou une action doivent être confiées à la plus petite entité capable de les mettre en œuvre. Représenter n’est pas remplacer.
L’Apel national n’a pas vu venir l’incompréhension suscitée par son soutien appuyé à la réforme du collège chez ses propres adhérents. Dans son numéro de mai/juin, en pleine monté en puissance de la contestation, le magazine de l’Apel nationale Famille & Éducation avait même enfoncé le clou, en balayant d’un revers de manche « les esprits chagrins [qui] s’échinent à détricoter les mesures annoncées par la ministre de l’Éducation nationale pour réformer le collège », y voyant pour sa part « de vraies réponses à des attentes fortes souvent exprimées par les parents ».
Faute d’explications et de débat, l’incompréhension des adhérents hostiles à la réforme a gonflé au fil des mois. Il n’est plus rare que des parents très engagés dans leur Apel d’établissement se plaignent d’une déconnexion avec les préoccupations du siège de la rue Saint-Jacques à Paris, accusé de faire sa vie tout seul. L’union sacrée autour de l’UNAPEL, qui avait mené de main de maître les manifestations géantes pour sauver l’école libre en 1984, paraît beaucoup moins palpable aujourd’hui.
« De toute évidence, cet événement marque une crise de légitimité qui s’explique par un déficit de représentativité, analyse Olivier Gosset. J’attends de l’Apel nationale qu’elle exerce le mandat qui lui est confié en se mettant d’abord à l’écoute de ses mandants. C’est à elle d’exercer son ministère de service plutôt que d’être l’antichambre de la rue de Grenelle. Une association doit se soucier des associés qui la constituent. En famille, toute grande décision ne se prend-elle pas après un conseil ? »
Un autre incident a suscité l’incompréhension avant l’été dans le magazine Famille & Éducation : le dossier sur l’éducation affective et sexuelle des jeunes, jugé démobilisant par un certain nombre de parents, au point que le numéro de rentrée a dû compléter la donne en rappelant l’importance du rôle des parents et en mentionnant « le discours de l’Église sur ce sujet ».
L’Apel doit mieux communiquer sur ses missions pour que les parents en voient vraiment les fruits.
Depuis le printemps dernier, d’autres établissements à Paris notamment réfléchissent également à quitter le bureau national de l’Apel. « C’est très technique et politique, confie l’un d’eux, mais l’intention est ferme de faire quelque chose sans mettre en porte à faux la direction de nos établissements ». « C’est très tendu, confie un autre, l’Apel doit mieux communiquer sur ses missions pour que les parents en voient vraiment les fruits, car dans nos établissements, nous sommes nombreux à nous dire : pourquoi cotiser à une association qui dit le contraire de ce qu’on pense sans nous consulter ? »
Clotilde Hamon
De fait, les parents catholiques qui inscrivent leurs enfants dans des écoles et collèges catholiques entendent que leurs enfants bénéficient effectivement d’une éducation catholique et ne soient pas de simples clones des établissements publics actuels.
Il y a lieu en effet que soient appliqués dans les établissements choisis et payés par leurs soins ce texte de la Congrégation pour l’éducation catholique de 1988 :
"Le 28 octobre 1965, le Concile Vatican II approuvait la déclaration " Gravissimum Educationis " sur l’éducation chrétienne. Dans ce texte conciliaire était définie la caractéristique essentielle de l’école catholique : " tout autant que les autres écoles, celle-ci poursuit des fins culturelles et la formation des jeunes. Ce qui lui appartient en propre c’est de créer pour la communauté scolaire une atmosphère animée d’un esprit évangélique de liberté et de charité, d’aider les adolescents à développer leur personnalité en faisant en même temps croître cette créature nouvelle qu’ils sont devenus par le baptême ; et finalement d’ordonner toute la culture humaine à l’annonce du salut de telle sorte que la connaissance graduelle que les élèves acquièrent du monde, de la vie et de l’homme, soit illuminée par la foi ".[...]
Nous en sommes loin aujourd’hui, dans certains établissements d’enseignement catholique. Par charité chrétienne, nous ne citerons pas ce lycée catholique sous contrat, dont le directeur avait admonesté un professeur pour avoir maintenu une courte prière avant chaque cours.
A chacun donc de méditer et de mettre en pratique le rappel insistant du pape Benoît XVI :
"Comme vous le savez, le travail d’un professeur ne consiste pas seulement à transmettre des informations ou à enseigner des compétences pour procurer un profit économique à la société ; l’éducation n’est pas et ne doit jamais être considérée selon une optique purement utilitaire. Il s’agit de former la personne humaine, en lui donnant le bagage nécessaire pour vivre pleinement sa vie - en bref -, il s’agit de transmettre la sagesse. Et la vraie sagesse est inséparable de la connaissance du Créateur, car « nous sommes en effet dans sa main, et nous et nos paroles, et toute intelligence et tout savoir pratique » (Sg 7, 16). »
(1) Union nationale des associations de parents d’élèves de l’enseignement libre.