L’Eglise catholique en France en grande difficulté financière
L’église catholique en France n’est plus que l’ombre d’elle-même, comparée à ce qu’elle fut ne serait-ce que dans les années mille neuf cent cinquante et soixante- et traverse de grandes difficultés : très faible nombre de catholiques pratiquants réguliers (1,7% dans le diocèse de Blois pour prendre un exemple), avec en contrepoint des difficultés financières importantes avec notamment la baisse du produit du denier du culte.
S’agissant de l’Etat et des collectivités territoriales, la situation n’est pas plus brillante et on observe en maints endroits des difficultés ou des réticences pour financer l’entretien des édifices religieux.
Deux articles pour illustrer cette situation :
« A Bruxelles, une efficacité budgétaire, visant à rationaliser les biens de l’Eglise, a conduit au départ d’une jeune communauté dynamique et appréciée, la fraternité monastique de Jérusalem. En France ce sont a priori 17 des 32 séminaires qui vont fermer pour les mêmes raisons de rationalisation financières. L’Assemblée plénière de Lourdes, qui vient de s’achever, avait au menu de ses travaux, les séminaires et les restructurations financières rendues nécessaires par la baisse des revenus de l’Eglise en France. Deux thèmes croisés dont les lieux de formations de nos futurs prêtres risquent bien de faire les frais. Le denier baisse et les lettres des diocèses regorgent d’appels anxieux aux fidèles. Les jeunes donnent moins, les anciens décèdent et certains boycottent le denier pour exprimer leur désaccord avec leur évêque.
Résultat de cette désolation financière, comme tout bon gestionnaire avisé, une coupe budgétaire s’impose. Les séminaires, parmi d’autres restrictions prévues ailleurs, vont donc servir de variable d’ajustement, puisqu’il a été décidé qu’un lieu de formation ayant moins de 17 à 20 séminaristes fermerait. Ce qui en l’état des vocations toucheraient 17 maisons en France. Une décision de prudence, en bon père de famille. Toutefois, tous les diocèses qui, ces dernières années, ont rouvert un séminaire, chez eux, sur leurs terres, ont vu repartir les vocations locales, même s’ils n’atteignent pas la barre désormais fatidique des 17 postulants. Il y a du reste là une logique d’appartenance à l’Eglise locale qui mériterait bien un synode !
Quand la logique comptable prend un ascendant si important dans une question qui relève aussi de la foi en la Providence et de l’espérance, la prudence est-elle encore une vertu ? Les nombreuses expériences de religieux, de saints et même de laïcs engagés, montrent que pourtant quand il s’agit de faire une œuvre de Dieu, la Providence pourvoit toujours en abondance. Certes parfois à l’extrême dernière seconde ! Mais si nous sommes invités à prier pour que le maître envoie des ouvriers à sa moisson, comment imaginer qu’il ne donnera pas le gîte et le couvert à ces ouvriers ? Sans doute vouloir faire une œuvre pour Dieu n’est pas nécessairement faire l’œuvre de Dieu.
Mais un séminaire qui dispense fidèlement la vérité du Christ à ses pensionnaires, une église qui abrite des religieux qui portent du fruit ne sont-ils pas nécessairement dans la main de la Providence ? N’y a –t-il pas dans notre logique comptable un manque de confiance et d’abandon et par là un défaut d’adéquation entre notre vie et notre espérance ? Bien entendu ouvrir un séminaire pour trois ou quatre séminaristes pourrait paraître exagéré. Et encore, combien d’œuvres commencent petitement et patientent longuement avant d’éclore ? Mais quelle serait alors la bonne barre fatidique ?
Ce qui vaut pour ces grandes questions pastorales de l’Eglise institution, ne vaut-il, pas du reste de notre propre gestion quotidienne, nous dont les choix de vie ou de profession sont (parfois) plus proches de la logique comptable que de la logique divine. Notre sagesse prudentielle se révèle parfois un manque de confiance en Dieu et nous donnons à la première partie de l’adage, « aides-toi et le ciel t’aidera » une place dont l’hypertrophie pourrait bien cacher un réflexe sécuritaire bien loin de l’abandon et de la confiance.
Quand la logique comptable étouffe l’espérance qu’en est-il donc de notre foi ? »
Cyril Brun, rédacteur en chef
Source :
« Évêque de Séez et responsable du groupe de travail « Les églises, un nouvel enjeu pastoral », Mgr Jacques Habert, répond aux questions de La Croix suite à la proposition de Stéphane Bern de « faire payer l’entrée des cathédrales ».
Comment réagissez-vous la proposition de Stéphane Bern – chargé par le président de la République d’une mission sur le patrimoine – de faire payer l’entrée des cathédrales pour en financer l’entretien et la restauration ?
D’emblée, une telle proposition entre en contradiction avec la loi de 1905 sur la séparation entre l’Église et l’État. La loi spécifie, en effet, que l’État, propriétaire des lieux de cultes construits avant 1905 en donne l’affectation « gratuite, exclusive et permanente » à l’Église. En faire payer l’entrée contreviendrait donc à la première de ces conditions. Or, nous devons garder à l’esprit que cette loi, fruit d’un long processus engagé dès la Révolution, garantit depuis plus de 110 ans un équilibre entre les pouvoirs publics et l’Église qui vivent ainsi en bonne intelligence. Toute décision qui la remet en cause pourrait être lourde de conséquences…
Pour autant, Stéphane Bern soulève une vraie et bonne question, celle de l’entretien très coûteux des édifices religieux, petits et grands, célèbres ou moins connus. Cette question financière se pose en permanence comme nous l’avons constaté en travaillant sur ce dossier, en 2012-2013, avec le ministère de la culture pour identifier les problèmes et imaginer des solutions.
Stéphane Bern dit s’inspirer de modèles étrangers comme le Royaume-Uni ou l’Italie…
Certes. Mais dans ces pays, l’Église est propriétaire des édifices et définit donc elle-même ses choix quant à leur accès, payant ou gratuit. On ne peut donc calquer ces exemples sur notre réalité singulière régie par la loi de 1905.
Certains lieux de culte font pourtant déjà payer la visite de leur trésor ou de leurs tours, organisent des concerts payants… Qu’en pensez-vous ?
Une fois bien spécifié qu’une église ou une cathédrale n’est pas un musée, mais un lieu de recueillement ouvert à tous, il est vrai que, sous certaines conditions qui n’entravent pas cette ouverture, tel ou tel espace bien défini peut se visiter en payant un droit d’entrée dans la mesure où cela ne gêne pas l’accès général. Il s’agit alors d’une pratique culturelle et non plus cultuelle.
Ressentez-vous un intérêt du public, chrétien ou non, pour le patrimoine religieux ?
Indéniablement ! Ce dimanche, dans mon diocèse, nous avons célébré la rénovation du clocher de l’église de Seton en présence du maire du village, d’un représentant du sénateur… de catholiques et de beaucoup d’autres personnes. Tous étaient réunis par leur attachement à ce patrimoine qui concerne chacun, pratiquant ou non. Voyez l’engagement et le courage des innombrables associations qui font vivre ce patrimoine. Elles déplorent souvent le manque de moyens mais ne baissent pas les bras pour autant. »
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