Nos dirigeants considèrent la pratique religieuse comme accessoire alors qu’elle est essentielle pour la plupart des citoyens pratiquant une religion
« Une soixantaine de parlementaires ont signé une tribune publiée dans Le Figaro, dans laquelle ils interpellent le gouvernement :
Pour des raisons sanitaires, nous sommes rentrés dans une période de restriction considérable des libertés, libertés de se déplacer, de travailler, de faire vivre les associations, de rencontrer nos parents, nos amis ; liberté de culte pour toutes les religions, chrétiennes ou non.
Cette restriction de liberté est jusqu’ici consentie par une très grande majorité de nos concitoyens, conscients de la nécessité de maîtriser l’épidémie, mais également conscients que cette perte des libertés fondamentales est temporaire.
Le président de la République nous a annoncé le déconfinement à partir du 11 mai, c’est-à-dire la reconquête progressive des libertés dont la perte avait été provisoirement consentie.
L’exercice n’est pas simple. Il est fait de règles venues d’en haut et de confiance dans le sens des responsabilités de nos compatriotes.
Le gouvernement a fait le choix d’un déconfinement progressif. Il édicte un ordre des priorités qui devient très vite un ordre d’importance.
C’est là que les citoyens français, pratiquant une religion dans un lieu de culte, ne comprennent plus cet ordre d’importance.
Ils constatent d’abord l’ignorance de nos dirigeants quant aux pratiques religieuses, et la paresse de certains d’entre eux quand il s’agit de faire l’effort de mieux connaître et comprendre les religions. Lorsque le premier ministre dit, à la tribune de l’Assemblée nationale, que les lieux de culte resteront ouverts, mais que les « cérémonies » ne pourront pas y être célébrées, il fait fausse route. Les cérémonies ne sont pas interdites, mais seuls les rassemblements le sont. C’est avec ce type d’approximation que la police nationale est entrée armée dans l’église Saint-André de l’Europe à Paris (8e ), alors que le curé célébrait une messe sans qu’il y ait rassemblement. Jamais nos dirigeants n’ont semblé aussi ignorants de la réalité religieuse de nos concitoyens.
Les citoyens français pratiquant une religion constatent que nos dirigeants considèrent cette pratique comme accessoire dans leurs vies, alors qu’elle est pour la plupart d’entre eux essentielle au sens étymologique du terme. Ces dirigeants, faute peut-être d’exercer cette vie spirituelle, n’imaginent pas que celle-ci puisse être indispensable à nos concitoyens qui pratiquent une religion. Ils imaginent que l’on peut se passer de pratique religieuse comme on peut se passer d’un loisir superflu. Leur ignorance les amène à prendre des mesures blessantes pour les Français qui pratiquent une religion, ou qui jugent indispensable de se retrouver dans un lieu de culte à l’occasion d’obsèques. Que devient une civilisation qui n’honore plus ses morts ?
Les citoyens français pratiquant une religion ont fait la preuve d’une très grande sagesse, voire d’une très grande « résilience » depuis le début de la pandémie. Ils se sont pour beaucoup, parmi d’autres, investis avec force dans des actions de solidarité. Ils ne sont pas moins responsables que d’autres lorsqu’il s’agit d’organiser le culte en respectant les règles liées à la pandémie et ne comprennent pas que leurs propositions d’organisation soit balayées d’un revers de main.
La taille des lieux de culte permet de prendre les dispositions pour éloigner les chaises, répartir les fidèles pour satisfaire aux exigences sanitaires. Ceux-ci ne sont pas moins que les autres Français, dignes de confiance. L’interdiction de rassemblements dans les lieux de culte avant le 2 juin prochain, c’est-à-dire, notamment, après les grandes fêtes chrétiennes de l’Ascension et de la Pentecôte, est souvent vécue comme une humiliation et une atteinte inédite à la liberté de culte.
Non, les citoyens français qui pratiquent une religion ne sont pas des citoyens de seconde zone, qui vaudraient moins que des consommateurs autorisés à fréquenter leur boutique préférée.
Les préfets pourraient réunir les représentants départementaux des cultes pour étudier localement les conditions d’un recommencement des célébrations du culte à partir du 11 mai. Les différents cultes sont capables de respecter les mêmes mesures sanitaires que les autres lieux publics actuellement ouverts. Il est donc incompréhensible que dès lors que les mesures sanitaires de base sont respectées dans les lieux de culte, les rassemblements en vue des cérémonies ne soient pas autorisés.
C’est avec gravité que nous interpellons le gouvernement afin qu’il revienne sur cette décision et examine avec plus de « bienveillance » et d’attention la demande des grandes religions de France qui souhaitent pouvoir exercer le culte en toute liberté. Nous attirons leur attention sur les conséquences graves que pourrait avoir une atteinte sans précédent à l’une des libertés fondamentales des citoyens français : la liberté de culte. »
Liste des signataires :
Marc Le Fur, Vice-président de l’Assemblée nationale, Député des Côtes d’Armor
Damien Abad, Député de l’Ain, Président du Groupe Les Républicains à l’Assemblée Nationale
Bruno Retailleau, Sénateur de la Vendée, Président du Groupe Les Républicains au Sénat
François-Xavier Bellamy, Député au Parlement européen, président de la délégation française au sein du groupe PPE
Emmanuelle Anthoine, Députée de la Drôme
Julien Aubert, Député du Vaucluse
Serge Babary, Sénateur d’Indre-et-Loire
Philippe Bas, Sénateur de la Manche
Jérôme Bascher, Sénateur de l’Oise
Thibault Bazin, Député de Meurthe-et-Moselle
Valérie Beauvais, Députée de la Marne
Jean Bizet, Sénateur de la Manche
Céline Boulay-Espéronnier, Sénatrice de Paris
Bernard Bonne, Sénateur de la Loire
Jean-Claude Bouchet, Député du Vaucluse
Xavier Breton, Député de l’Ain
Bernard Brochand, Député des Alpes-Maritimes
Anne Chain-Larché, Sénatrice de Seine-et-Marne
Marie-Christine Chauvin, Sénatrice du Jura
Guillaume Chevrollier, Sénateur de la Mayenne
Marta de Cidrac, Sénatrice des Yvelines
Pierre Cordier, Député des Ardennes
Pierre Cuypers, Sénateur de Seine-et-Marne
Laure Darcos, Sénatrice de l’Essonne
Marc-Philippe Daubresse, Sénateur du Nord
Jacky Deromédi, Sénatrice des Français de l’Etranger
Dominique de Legge, Sénateur d’Ille-et-Vilaine
Louis-Jean de Nicolay, Sénateur de la Sarthe
Catherine Di Folco, Sénatrice du Rhône
Julien Dive, Député de l’Aisne
Pierre-Henri Dumont, Député du Pas-de-Calais
Dominique Estrosi-Sassone, Sénatrice des Alpes-Maritime
Daniel Fasquelle, Député du Pas-de-Calais
Joëlle Garriaud-Maylam, Sénatrice des Français de l’Etranger
Annie Genevard, Députée du Doubs
Philippe Gosselin, Député de la Manche
Pascale Gruny, Sénatrice de l’Aisne
Patrick Hetzel, Député du Bas-Rhin
Brigitte Kuster, Députée de Paris
Antoine Lefèvre, Sénateur de l’Aisne
Constance Le Grip, Députée des Hauts-de-Seine
Olivier Marleix, Député d’Eure-et-Loir
Jean-Louis Masson, Député du Var
Gérard Menuel, Député de l’Aube
Sébastien Meurant, Sénateur du Val d’Oise
Brigitte Micouleau, Sénatrice de la Haute-Garonne
Jean-Marie Morisset, Sénateur des Deux-Sèvres
Philippe Mouiller, Sénateur des Deux-Sèvres
Jérôme Nury, Député de l’Orne
Jean-François Parigi, Député de Seine-et-Marne
Bernard Perrut, Député du Rhône
Didier Quentin, Député de la Charente-Maritime
Damien Regnard, Sénateur des Français de l’Etranger
Frédéric Reiss, Député du Bas-Rhin
Jean-Marie Sermier, Député du Jura
Bruno Sido, Sénateur de la Haute-Marne
Eric Straumann, Député du Haut-Rhin
Guy Teissier, Député des Bouches-du-Rhône
Jean-Louis Thiériot, Député de Seine-et-Marne
Claudine Thomas, Sénatrice de Seine-et-Marne
Laurence Trastour-Isnart, Député des Alpes-Maritime
Michel Vaspart, Sénateur des Côtes d’Armor
Pierre Vatin, Député de l’Oise
Patrice Verchère, Député du Rhône
Jean-Pierre Vial, Sénateur de la Savoie
Stéphane Viry, Député des Vosges
Eric Woerth, Député de l’Oise
Source : Le Figaro, reproduit par le salon beige