On peut espérer que la barbarie nous ramène paradoxalement à notre identité

mercredi 9 décembre 2015
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On peut espérer que la barbarie nous ramène paradoxalement à notre identité. La jeunesse française est prête pour redécouvrir toute la force de la civilisation chrétienne



« EXCLUSIF MAGAZINE - La France se cherche après le traumatisme des attentats et le premier tour des élections régionales. Il est devenu impératif de rendre à la France toute la vigueur de sa culture, et d’accompagner le réveil de sa jeunesse. Interview exclusive de Philippe de Villiers et François-Xavier Bellamy.

La grande épreuve que traverse la France sera-t-elle synonyme de sursaut pour les jeunes générations ?

Philippe de Villiers – On peut espérer que la barbarie nous ramène paradoxalement à notre identité. La jeunesse française est prête pour redécouvrir toute la force de la civilisation chrétienne. En éclaireurs, je pense à tous ces prêtres ardents de la génération Benoît XVI. Du feu ! Ils incarnent un christianisme granitique.

Cette jeunesse-là n’a plus peur du sacrifice. Cette nouvelle génération renoue avec la Tradition, non pas d’abord avec des coutumes, mais avec l’audace. Elle a compris que la société civile avait besoin de héros et l’Église de saints !

François-Xavier Bellamy – L’urgence est en effet de retrouver le sens de notre héritage et, avec lui, cet appel qui nous dépasse.…Il est temps de renoncer à la déconstruction méthodique que notre société subit depuis quelques décennies. Deux jours après les attentats à Paris, l’Association des maires de France persévérait dans ce même déni en appelant à interdire les crèches dans l’espace public. L’obsession de supprimer toute trace du christianisme, c’est aussi le mobile des djihadistes. Maintenant, il est temps de faire un choix !

Il est temps de renoncer à la déconstruction méthodique que notre société subit depuis quelques décennies.

François-Xavier Bellamy

En quoi sommes-nous à la croisée des chemins ?

P. V. – On voit bien ce qui se passe aujourd’hui : les laïcards font le vide et les islamistes le remplissent. Ils nous frappent parce qu’ils nous méprisent. Cela ne peut plus durer.

F.-X. B. – Nous sommes arrivés à un point de bifurcation dans notre Histoire, et il suffit sans doute de peu de chose pour que notre société s’engage dans la voie du renoncement, ou de la refondation. Soit nous décidons de faire un pas de plus vers une liberté nihiliste, relativiste – un pas dans le vide –, soit nous acceptons de nous réconcilier avec une sagesse qui nous précède, et de tout donner pour protéger un héritage qui nous dépasse.

La jeunesse est face à ce choix. Elle hésite. Succédant à la génération de Mai 68, qui n’aura transmis que l’ivresse du doute, elle est fragilisée bien sûr par l’individualisme consumériste, mais cela n’a pas étouffé en elle la soif de générosité, le désir de se donner.Et les événements récents réveillent cette aspiration. Il suffit d’observer le nombre de jeunes qui, très loin de l’armée au départ, viennent depuis les attentats s’engager pour servir la France.

On voit bien ce qui se passe aujourd’hui : les laïcards font le vide et les islamistes le remplissent. Ils nous frappent parce qu’ils nous méprisent. Cela ne peut plus durer

Philippe de Villiers

Le patriotisme a subitement repris des couleurs chez les jeunes. Pourquoi ?

P. V. – Je suis très impressionné par tous ces drapeaux qui sortent de partout comme des fiertés bourgeonnantes. On reparle de la France ! Depuis les attentats, l’hymne national est repris en boucle. C’est une façon de dire : la France doit survivre ! Mais quand j’écoute certaines autorités spirituelles, j’ai l’impression que le patriotisme reste une chose dangereuse. On veut bien pousser les jeunes à sauver la planète, mais pas la France !

F.-X. B. – Il est en effet urgent de parler de la France à tous les jeunes, y compris à ceux qui s’en sentent les plus éloignés, comme le font par exemple les écoles du réseau Espérance banlieues. Tout l’enjeu est d’offrir à ces jeunes l’occasion d’aimer leur pays, notre pays.

La jeunesse a-t-elle envie de prendre des risques pour son pays ?

P. V. – La jeunesse de demain sera capable de franchir des lignes rouges. Elle n’aura pas peur d’aller en prison pour avoir prononcé des mots ou abordé des sujets interdits ! L’islamophobie aujourd’hui est un délit, la christianophobie, elle, une opinion ! Notre classe politique aseptisée n’ose plus rien dire de peur des représailles. Les dissidents n’auront pas peur de franchir les interdits.

F.-X. B.– Pour un jeune qui s’engage aujourd’hui, le martyre n’est pas un horizon, mais il est une possibilité. Un soldat ne cherche pas à mourir pour son pays, mais à gagner la guerre : on ne s’engage pas en cherchant la mort comme les kamikazes ! Pourtant, si nous voulons porter quelque chose qui nous dépasse, alors il faut admettre que nous pourrons y laisser quelque chose de notre confort, de notre sécurité, de notre tranquillité, de notre réputation, et peut-être ultimement notre vie…
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Il nous faut des enseignants, des journalistes, des cinéastes, des romanciers…… Nous pouvons changer l’Histoire avec cent personnes, et nous allons le faire, si nous retrouvons le sens des priorités.

Où la jeunesse doit-elle s’engager en priorité ?

F.-X. B. – La priorité absolue, me semble-t-il, c’est le travail de la culture et de l’enseignement. Nous avons abandonné les métiers de la parole, de l’image. C’est pourtant par eux qu’une société se transforme, et que l’Histoire se joue ; la politique n’évolue que quand les vrais changements ont déjà eu lieu.

Philippe de Villiers a été pionnier en lançant le Puy du Fou : seul face au monde, et seul parmi les catholiques ! Si nous avions su inventer dix lieux de transmission semblables, nous n’en serions pas là maintenant. Il nous faut des enseignants, des journalistes, des cinéastes, des romanciers…… Nous pouvons changer l’Histoire avec cent personnes, et nous allons le faire, si nous retrouvons le sens des priorités.
P. V. – Il y a de nombreux circuits d’information parallèles grâce auquel se diffuse mon dernier livre – Le moment est venu de dire ce que j’ai vu (Albin Michel). Partout, je vois des sociétés parallèles. Cela commence par les écoles. Chaque année, il y a 50 % de plus d’écoles hors contrat qui naissent ! Il suffit de quelques familles pour créer un îlot de résistance.

On voit se développer dans toutes les sphères privées et publiques des capillarités réfractaires. Je crois que toutes ces réalités vont finir par se connecter. Comment ? Les jeunes vont devenir indomptables. Ils vont aller d’un isolat à un autre – de l’école à la culture en passant par les « réseaux de la blogo-sphère résistante » –, et ils seront libres vis-à-vis de la « médiacaste ». Soljenitsyne m’a confié un jour que les dissidents avaient été à l’Est et qu’ils seraient désormais à l’Ouest. Cela est en train d’arriver ».
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Source :

famille chrétienne