Le Saint Linceul du Christ, de Lirey et Chambéry à Turin

jeudi 21 mai 2015
par  Jean-François
popularité : 5%


Le Saint Linceul de Turin
Témoin de la mort et de la Résurrection
de Notre-Seigneur Jésus-Christ
Sa translation depuis la Palestine jusqu’en France
(Lirey et Chambéry)
et en Italie (Turin)



Le Saint Linceul de Turin, fréquemment appelé Saint Suaire de Turin, « est un tissu en lin à chevrons de 4,42 mètres de long et de 1,13 mètres de large. Sur les deux côtés longs du Drap, il y a une lisière particulièrement rare. Dans la partie supérieure, on voit une bande de 8 centimètres de long du même tissu, finement cousue à la partie principale du Drap. Aujourd’hui, après la restauration de 2002, le tissu n’a plus de rapiéçages ni de reprises ; il est soutenu et cousu à une nouvelle toile de renforcement et est conservé, étendu dans une châsse étanche dans du gaz inerte, dans la cathédrale de Turin.

Sur ce tissu, on voit reproduit la double image, frontale et dorsale, d’un homme adulte, cadavre, nu, avec des moustaches, une barbe et de longs cheveux, aux formes harmonieuses et de grande taille.

Les nombreuses blessures révèlent que cet homme a été crucifié avec des clous, après avoir été frappé, flagellé, couronné d’épines et, qu’après sa mort, il a été transpercé au côté. Exactement comme Jésus »

(source : Congregazione dei Preti della Real Chiesa di San Lorenzo, Via Palazzo di Città 4, 10122 Torino)

Le Saint Linceul de Turin, pièce la plus étudiée au monde

« Les examens et les recherches effectuées sur le Saint Suaire sont nombreux. Aujourd’hui on sait qu’il s’agit de la pièce la plus étudiée au monde et on compte plus de vingt-cinq disciplines y engagées.

On veut ici rappeler quelques-unes :

- la photographie de 1898 (première photographie, réalisée par l’avocat Secondo Pia) a permis d’examiner d’un point de vue médico-légal les aspects traumatiques du Crucifié en constatant la parfaite cohérence avec le récit de l’Evangile.

- en 1973, le docteur Max Frei, spécialiste suisse, fait des prélèvements sur la toile et relève la présence de pollen de plantes qui sont surtout de provenance moyen-orientale.

- en 1978, les recherches conduites par un groupe de savants du Sturp, pour la plupart Américains, ont déterminé que l’image de l’Homme n’est pas peinte, qu’il s’agit d’une oxydation superficielle de la cellulose contenue dans les fibres du lin ; un cadavre a été enveloppé dans ce Drap et en a laissé l’empreinte d’une façon encore aujourd’hui inexplicable.

- les recherches sur les taches hématiques (taches de sang) ont déterminé avec certitude qu’il s’agit de sang humain, veineux et artériel, ante et post mortem, du groupe sanguin AB.
Ce sang se révèle être du même genre (masculin) et groupe (AB) que celui du miracle eucharistique de Lanciano (Chieti-Italie) et celui relevé sur le Suaire d’Oviedo (Espagne).

- L’examen approfondi de l’empreinte de la figure humaine a révélé des intensités qui diminuent en proportion de la distance corps-drap. Ces informations, décodées, ont permis la réalisation d’images en trois dimensions, selon des techniques différentes.
Les résultats obtenus confirment le caractère tridimensionnel de l’empreinte du Saint Suaire et se révèlent très importants parce qu’ils mettent en évidence des détails non vérifiables dans la vision à deux dimensions.

- en 1988, trois laboratoires (Tucson, Oxford et Zürich) ont procédé à l’examen de la datation avec la méthode du carbone 14, sur un échantillon de tissu prélevé de l’extrémité gauche [haute] du Saint Suaire et il en ressort une date comprise entre 1260 et 1380.

Aujourd’hui ce résultat de datation au carbone 14 n’est plus considéré comme fiable parce que l’on pense que la pollution et les contaminations que ce tissu a subi au cours des siècles ont pu en avoir altéré le résultat. »

(source : Congregazione dei Preti della Real Chiesa di San Lorenzo, Via Palazzo di Città 4, 10122 Torino)

N.B. : Les contaminations ici évoquées comprennent notamment le grave incendie survenu en 1532 à l’intérieur de la Chapelle Ducale de Chambéry, en laquelle la Tunique était à l’époque conservée ; la Tunique a alors été exposée à de très fortes températures.

La translation de la sainte Tunique, de Jérusalem jusqu’en France puis dans le duché de Savoie

La Sainte Tunique, pieusement mise à l’abri par les apôtres et les premiers chrétiens de Jérusalem, fut ensuite déplacée hors de Jérusalem, en raison des persécutions qui frappèrent les premiers chrétiens à Jérusalem même. C’est ainsi qu’elle fut mise en lieu plus sûr, à Constantinople, après être passé par Edesse.

C’est lors du sac fort peu peu glorieux de Constantinople par les vénitiens et les Francs en 1204 que la Sainte Relique fut récupérée ou dérobée et ramenée en France, où on la retrouva en 1355, en Champagne, à Lirey (actuel département de l’Aube), à 20 km au sud de Troyes. Elle y fut ramenée – et ainsi sauvée de la destruction lors de la prise de Constantinople par les musulmans Turcs en 1453- par le chevalier franc Othon de la Roche (mort en 1234), ancêtre par alliance de Geoffroy de Charny, qui emmena le Linceul à Athènes lors de la 4° croisade, après le sac de Constantinople, en 1204.

Les ostensions du Saint Linceul à Lirey (Champagne)

Geoffroy de Charny érigea à Lirey, village universellement connu au Moyen-âge, une collégiale afin d’y déposer, en 1355, le saint linceul. C’est dans la collégiale de Lirey, ainsi fondée par le chevalier de Charny, que cette relique fut pour la première fois l’objet d’ostensions (expositions en public).

Témoin du pèlerinage dont le saint Linceul fut l’objet à Lirey, le musée de Cluny conserve une enseigne de pèlerinage (en) de la seconde moitié du XIVe siècle ou de la première moitié du siècle suivant, présentant la plus ancienne représentation connue du Suaire de Turin, avec à ses côtés les blasons des familles de Charny et de Vergy.

Enseigne en bronze du pèlerinage de Lirey représentant le saint Suaire, remontant à la seconde moitié du 14e siècle ; trouvé dans la Seine, on y voit le saint Suaire, avec les blasons de la famille de Charny

C’est Marguerite, dernière descendante de Geoffroy de Charny, qui vendit à la Maison de Savoie, en 1453, à Genève, la sainte Tunique, en dépit des vives protestations des chanoines de Lirey.

La collégiale de Lirey, érigée en 1353 par Geoffroy de Charny, reconstruite en 1526 par le doyen Hayard, fut hélas démolie à la Révolution Française. Elle fut reconstruite en 1897 par le legs de Mme de Bréville née Camusat de Vaugourdon. L’architecte en fut R. Pincot, curé de Mézières et l’entrepreneur M. Vinçon de Saint Phal.

Le chevalier Geoffroy de Charny et son épouse Jeanne de Vergy, premiers propriétaires attestés du Saint Linceul

Geoffroi de Charny, considéré par ses contemporains comme l’un des meilleurs chevaliers de son temps, « le plus preudomme et le plus vaillant de tous les autres », fut l’auteur de trois ouvrages majeurs : le Livre de chevalerie en prose, le Livre Charny en vers et les Demandes pour la joute, les tournois et la guerre.

« Geoffroi de Charny et sa seconde épouse, Jeanne de Vergy, furent les premiers propriétaires historiquement attestés du Linceul de Turin. La tradition orale en vigueur dans la famille de Charny attribuait à Geoffroi l’acquisition du suaire. Une lettre de 1389 de l’anti-pape Clément VII, adressée à son fils Geoffroi II et très certainement rédigée en fonction d’informations fournies par le destinataire, affirme que le père de celui-ci avait reçu la relique « qui lui avait été libéralement offerte » (en latin, « liberaliter sibi oblatam ») et qu’il l’avait fait déposer dans l’église de Lirey qu’il avait fondée » (source Wikipedia).

Site à consulter

photo musée cluny

Des précisions complémentaires, d’un intérêt majeur, concernant l’histoire de la translation du Saint Linceul en Champagne

- Les années perdues du Linceul

« Alessandro Piana est biologiste et a fait des recherches sur le Linceul de Turin. Il a bien voulu écrire pour nous un résumé de son article paru sur Internet sur la question essentielle de savoir où se trouvait cette relique avant d’apparaître à Lirey en France.
Nous l’en remercions vivement.

L’article dans sa version détaillée peut être trouvé sur Internet* en anglais et en italien.
Selon la tradition, le Linceul aujourd’hui conservé dans la cathédrale de Turin n’est rien d’autre que le drap dans lequel Jésus fut enveloppé après sa mort sur la croix. Pour essayer de reconstituer l’historique des vicissitudes terrestres du Saint Suaire la recherche a toujours dû affronter une question très épineuse, une des plus
grandes énigmes qui caractérisent ce mystère inextricable. Il s’agit d’un "trou" de presque cent cinquante ans, compris entre le siège de Constantinople en 1204 et sa réapparition à Lirey autour du milieu du XIVe siècle, années durant lesquelles on en perd complètement la trace.

Où se trouve ce tissu de lin sacré pendant ce temps-là ? Pour essayer de répondre à cette question, et donc expliquer ces "années perdues", il faut partir d’une hypothèse qui trouve actuellement le meilleur accueil parmi les spécialistes du Linceul, parce que c’est la plus riche de témoignages documentés. Suivant cette interprétation, le Linceul qui apparaît en France vers la moitié du XIVe siècle, dans la petite ville de Lirey, est le même que celui qui était conservé à Constantinople et qui fut volé pendant le sac des croisés en 1204.

Comment le Linceul arrive-t-il à Constantinople ? Il y parvient, à la suite de la conquête du sultanat arabe d’Edesse par l’armée byzantine, le 15 août 944 1. Nombreux sont les témoignages de voyageurs ordinaires et de souverains illustres, remontant au XIe et XIIe siècles 2, qui signalent la présence du Saint Suaire dans la
capitale byzantine où il reste jusqu’aux premières années du XIII ème siècle, quand la violence des croisés s’abat sur la ville.

Parmi les chroniqueurs qui rapportent les événements, il y a Robert de Clary dans les mémoires duquel nous trouvons des références intéressantes sur le Linceul. Après le sac de la ville cependant, on perd toute trace de la précieuse relique. Nous pouvons affirmer que le Linceul disparaît de Constantinople dans la période de temps comprise entre avril 1204 et août 1205. Trois témoignages différents signalent sa présence à Athènes à partir de l’été 1205.

Citons d’abord la lettre envoyé au Pape Innocent III par Théodore Ange Comnène, contenue dans le Chartularium Culisanense. Dans cette lettre Théodore implore le Saint Père pour que soient retrouvées au plus vite les précieuses reliques dispersées plus d’un an plus tôt, et signale la présence du Saint Suaire à Athènes. Il existe, de plus, le témoignage du légat du Pape Benoît de Sainte Suzanne qui, pendant l’été 1205, se trouve à Athènes pour participer à un entretien interreligieux. Enfin nous pouvons compter sur ce qu’affirme Nicolas d’Otrante qui, dans le courant de l’année 1207, rédige un écrit sur les reliques pillées en 1204 et cite les tissus utilisés pour la sépulture qu’il affirme avoir vus de ses propres yeux.

Afin d’approfondir le parcours du Linceul d’Athènes à Lirey il faut chercher à connaître un important dignitaire ayant participé au pillage de Constantinople : Othon de La Roche. Après le démantèlement de l’état byzantin, Othon, ex baron de Ray-sur-Saône, devient Seigneur d’Athènes. L’arrivée à Athènes doit être placée entre la fin de 1204 et le début de 1205. Ce qui correspond à la période où le Linceul commence à être signalé en Attique.

La possibilité d’approfondir la vie et les vicissitudes d’Othon de La Roche, a permis d’éclaircir davantage cette époque obscure. Lorsqu’on visite les lieux qui appartinrent à la famille de La Roche il est possible de rencontrer une série d’éléments utiles à notre enquête.

Dans la tour du château de Ray-sur-Saône de nombreux trésors de famille sont conservés, parmi lesquels des reliques rapportées de croisade par Othon . Au milieu de celles-ci, il y a un simple coffret de bois, finement décoré, de modestes dimensions (45cmx25cmx30cm) qui, selon ce qui est rapporté dans les mémoires de famille, aurait conservé le précieux Drap au moment de son retour en France.

La recherche, à ce point, pose trois questions. Tout d’abord il faut comprendre comment le Linceul est arrivé dans les mains d’Othon, pour être ensuite transféré en France ; ensuite savoir quand le Saint Suaire est arrivé en France ; et, enfin, si, convenablement plié, il pouvait être conservé dans le coffret que nous venons de décrire. En ce qui concerne la première question, on peut supposer qu’au moment de la répartition du butin, on décida de récompenser Othon de La Roche, étant donné le rôle important qu’il avait joué au cours de l’expédition, avec une des plus précieuses reliques qu’il y eût à Constantinople, le Saint Suaire, justement.

Passons maintenant à la deuxième question. Plusieurs savants estiment qu’Othon, après avoir reçu la Seigneurie d’Athènes, n’est jamais revenu en France 9. Ceci bien que sa tombe n’existe pas dans le Monastère de Daphni, en Grèce, où sont enterrés ses successeurs. Le dernier document qui signale la présence d’Othon à Athènes est une Bulle papale d’Honorius III datée du 12 février 1225.

A partir de la même année la Seigneurie passe dans les mains de son fils Guy. Othon, en compagnie de sa deuxième femme, retourne en France où il contribuera à enrichir l’abbaye de Bellevaux 11. La présence en Europe du Saint Suaire après 1208 est aussi confirmée par une autre preuve importante. Un document retrouvé dans les archives du diocèse de Langres affirme que Othon meurt en 1234, tandis que sa femme Elisabeth abandonne la vie terrestre deux années plus tard. Ceci prouve que l’un et l’autre ont fini leurs jours en France. Langres à l’époque faisait partie de cette portion du comté de Bourgogne, dans la région de Fouvent-Dampierre-Baujeu, à l’ouest de la Saône, dépendant de cette circonscription ecclésiastique, où la famille de Ray avait des propriétés. Une confirmation analogue est présente dans un document attestant une donation du beau-frère d’Othon.

Othon n’a pas été enterré dans sa petite ville mais dans l’église de Saint Laurent à Seveux, un petit village situé dans le voisinage de Ray-sur-Saône, où est sa pierre tombale. Cette localité se trouve justement dans la région où, nous venons de le voir, Othon et son épouse passent leurs dernières années de vie. L’existence de la tombe démontre sans équivoque le retour en France du noble croisé.

Concentrons-nous maintenant sur la dernière question : le Linceul a-t-il pu être gardé dans le coffret conservé au château de Ray-sur-Saône ? Les dimensions internes en sont de 37,5 cm de long sur 16,5 de large et environ 25 de haut. Le pliage en 96 parties se révèle être celui qui s’adapte le mieux aux dimensions internes du coffret. On l’obtient en pliant le drap douze fois en longueur, et huit en largeur 15.
Il faut donc considérer comme très probable que, sur la base d’une série de considérations exclusivement dimensionnelles, le coffret puisse avoir renfermé le Linceul.

Un lien ultérieur entre les Seigneurs de Ray-sur-Saône et le Linceul est représenté par une autre pièce conservée dans le château. Il s’agit d’un drap d’environ 50 cm de long sur 30 de large, avec une décoration florale, fixé sur une planche.
Sur le tissu est peinte la partie frontale du corpsd’un être humain de sexe masculin, extraordinairement semblable à l’homme du Linceul.

Après avoir démontré le lien entre les La Roche et le Linceul, voyons comment celui-ci réapparaît à Lirey au XIVe siècle, pas très loin de Ray-sur-Saône.

Différents auteurs considèrent Geoffroy Ier de Charny comme le premier propriétaire du Linceul à Lirey. Divers éléments font supposer que ceci n’est pas vrai, ou, du moins, ne l’est qu’en partie. Les généalogies familiales démontrent que Jeanne de Vergy, deuxième femme de Geoffroy Ier, est la descendante directe, à la cinquième génération, d’Othon de La Roche. Il est probable que Jeanne ait apporté en dot le Linceul au moment de son mariage avec Geoffroy Ier qui, seulement après cette union, devint Seigneur de Lirey. De plus, pendant la période de temps comprise entre 1360 et 1389 le Linceul est conservé au château de Montfort-en-Auxois, une propriété des Vergy. Par cette union, donc, Geoffroy Ier reçoit le Linceul qui, au cours des générations, est passé aux Vergy par l’intermédiaire de la famille de La Roche.

En nous appuyant sur les éléments recueillis jusqu’à présent nous pouvons affirmer que le Linceul se trouve en France à partir de 1225-1226, quand Othon de La Roche l’apporte dans son fief, après l’avoir acquis au cours de la quatrième croisade. Après sa mort, qui eut lieu en 1234, le Linceul reste dans les mains de la famille de Ray-sur-Saône jusqu’à ce que les jeux politiques et les unions familiales le portent dans celles des Vergy.

Cette recherche nous permet de supposer, avec une grande probabilité, que le Linceul de Turin a une origine plus ancienne que celle qu’a donné la datation au radiocarbone, considérée de différents côtés comme rien moins que fiable ».

Alessandro Piana

Source : abbe carmignac 046

- Sur les traces d’un antique codex diplomatique : le Chartularium Culisanense

« Nous présentons ici à nos lecteurs des informations peu connues mais exceptionnelles qui donnent des précisions ou des confirmations sur ce qui a été publié dans nos numéros 21 à propos du portrait de laVierge par saint Luc, 26 sur la maison de la Vierge à Lorette,46 sur les années perdues du Linceul de Turin. Le tout grâce à un document, le Chartularium Culisanense, qui se trouve à la Bibliothèque d’Etat de l’abbaye de Montevergine près d’Avellino en Italie.

Nous remercions son directeur le Père Andrea DavideCardin et Madame Anna Battaglia, le chercheur ayant entrepris l’étude de ce précieux manuscrit, pour nous avoir aimablement autorisés à reproduire l’article de cette dernière et les photographies de ces pièces uniquesdont nous vous laissons le plaisir et la surprise de découvrir le contenu. Vous trouverez en encart trois pages de la copie authentifiée du Chartularium Culinense.

La bibliothèque publique d’Etat de Montevergine* abrite quelques pages d’un manuscrit antique, le Chartularium Culisanense, qui est considéré par les
savants comme le codex diplomatique de l’ordre Constantinien Angelico originaire de Sainte Sophie*, établi par le despote d’Epire Nicéphore Ier Ange-Comnène. Cet exemplaire, constitué à l’origine d’un ensemble de documents de diverses natures, du XIII ème au XIX ème siècle, a pris le nom de « culisanense » parce qu’il était conservé dans le palais des princes Angelo !Comneno de Collesano dans la province de Palerme, connus comme De Angelo ou De Angelis.

Au début du XXe siècle le Chartularium a été examiné par différents experts et exposé à la Bibliothèque Nationale de Palerme à l’occasion du cinquantenaire du plébiscite des provinces siciliennes ; ensuite on le retrouve dans le patrimoine des Archives d’Etat de Naples, pour disparaître ensuite définitivement à cause des événements de ladeuxième guerre mondiale.

Par chance, en 1859 l’évêque de Monreale, Benedetto D’Acquisto, grand chancelier de l’ordre Constantinien Angelico, célèbre humaniste et théologien, fit réaliser des copies authentifiées des feuillets les plus remarquables. Ceux-ci portent sa signature autographe, comparée par des experts avec d’autres documents de sa main conservés aux archives ecclésiastiques. Ils sont extrêmement importants parce qu’ils rapportent des événements qui ne peuvent être vérifiés autrement par manque ou pauvreté de sources supplémentaires

« Le feuillet 126 présente une importance considérable car il contribue à éclaircir l’histoire du Saint Suaire et particulièrement une lacune d’un laps de
temps de cent cinquante ans.

Le Linceul, conservé secrètement à Montevergine pendant la seconde guerre mondiale pour des motifs de sécurité, arriva à Constantinople en 944 et y demeura jusqu’aux premières années du XIIIe siècle ; à ce moment l’assaut des croisés s’abattitsur la ville qu’ils mirent à sac.

A partir de ce moment on perdit complètement la trace du Suaire, entre 1204 et 1205. Un des rares documents qui signale explicitement sa présence à Athènes est la page 126du Chartularium Culisanense. Il s’agit d’une lettre, écrite le premier août 1205, par Théodore Angelo Comneno, neveu de l’empereur de Byzance, qui implore le Saint Père Innocent III pour qu’il intervienne afin de retrouver les reliques sacrées égarées et signale la présence du Saint Suaire à Athènes.

Le manuscrit cite textuellement ceci : « pendant le sac les soldats vénitiens et francs s’emparèrent aussi des lieux sacrés. Les Vénitiens prirent en partage les trésors d’or, d’argent et d’ivoire, les Francs prirent les reliques des saints et la plus sacrée d’entre elles, à savoir le Drap où fut enseveli après la mort et avant la résurrection Notre Seigneur Jésus Christ. Nous savons que les objets sacrés sont conservés à Venise...le Saint Suaire à Athènes. »

Les pages du Chartularium, présentes à la Bibliothèque d’Etat de Montevergine, sont actuellement les copies exécutées par Monseigneur D’Acquisto, des peu nombreux exemplaires rescapés et retrouvés intacts à la paroisse de San Tommaso a Capuana, après le tremblement de terre de 1980 ».

Source : abbe carmignac 049

Les ostensions du Saint Linceul à Chambéry (Duché de Savoie)

La précieuse relique demeura ainsi à Lirey, avant d’être transférée et acquise par le duc Ludovico de Savoie. Celui-ci l’installa à Chambéry, sa capitale, où il fit construire une Chapelle à l’intérieur même du palais de la Maison de Savoie.

Cette Chapelle, devenue Chapelle royale avec l’acquisition du Royaume de Sardaigne par la Maison de Savoie, construite entre 1408 et 1430, abrita de 1453 à 1578 le Saint-Suaire. Elle possède d’admirables vitraux du 16e siècle, une remarquable voute en trompe-l’œil. De style gothique, à l’exception de sa façade baroque du 17e siècle, elle dispose en son clocher d’un Grand carillon composé de ses 70 cloches, qui est le quatrième plus grand carillon au monde et le premier d’Europe.

De 1452 à 1578, le Saint-Suaire, propriété des ducs, fut ainsi exposé dans la Sainte-Chapelle de Chambéry. Les ostensions publiques commencèrent et, en 1506, le Saint-Siège accorda à la Maison de Savoie la concession du culte public. La ville de Chambéry devint alors un lieu important de pèlerinages.

« C’est le bouclier de ce pays, c’est notre grande relique », écrivait saint François de Sales à l’évêque de Belley à propos du Saint Suaire (Mgr Camus, L’Esprit du Bienheureux François de Sales.)

En 1532, un grave incendie endommagea la sainte Chapelle de Chambéry et faillit détruire le saint Linceul. Il put néanmoins être sauvé, non sans quelques dommages encore visibles et une exposition temporaire à des températures élevées.

Le duc de Savoie ayant déplacé sa capitale à Turin, la sainte tunique, que voulait vénérer saint Charles Borromée, archevêque de Milan, fut transférée à Turin en 1578. Elle ne revint jamais à Chambéry, en dépit des promesses faites au moment de son départ par le duc.

Reste cependant à Chambéry sa Sainte Chapelle, en laquelle se trouve une copie conforme grandeur nature du Saint Linceul, offerte par le diocèse de Turin.

Le Saint Linceul à Turin

Depuis 1578, le Saint Linceul a été l’objet de nombreuses ostensions à Turin. La Sainte relique est à présent la propriété du Saint-Siège, en la personne du souverain Pontife, depuis sa donation en 1983 par le dernier roi d’Italie, Umberto II, descendant de la Maison de Savoie.

La précédente ostension du Saint Linceul a eu lieu en 2010. L’ostension du 19 avril au 24 juin 2015, en la cathédrale métropolitaine Saint Jean-Baptiste, a pour thème « l’Amour le plus grand » et a lieu plus rapidement que prévu, en lien avec le bicentenaire de la naissance de don Bosco et deux catégories de personnes, les jeunes pour qui don Bosco a consacré sa vie, et les souffrants « parce que l’image du Suaire est l’image d’un homme qui a souffert » (Don Roberto Gottardo, président de la commission diocésaine du Saint Suaire).

La profonde méditation du pape Benoît XVI durant son pèlerinage au Saint Linceul, le 2 mai 2010

« On peut dire que le Saint Suaire est l’Icône de ce mystère, l’Icône du Samedi Saint. En fait, c’est un linge sépulcral, qui a enveloppé la dépouille d’un homme crucifié correspondant en tout et pour tout à ce que les Evangiles disent de Jésus. Le Sabbat est le jour de la dissimulation de Dieu…

Le Samedi Saint est la « terre de personne » entre la mort et la résurrection, mais dans cette « terre de personne » est entré l’Un, l’Unique, qui l’a traversé avec les signes de sa Passion pour l’homme : « Passio Christi, Passio hominis ». Et le Suaire nous parle exactement de ce moment, il témoigne de manière précise de cet intervalle unique et non renouvelable dans l’histoire de l’humanité et de l’univers, lorsque Dieu, en Jésus-Christ, a partagé non seulement notre mort, mais aussi notre permanence dans la mort. la solidarité la plus radicale.

Durant ce laps de temps, « temps au-delà du temps », Jésus-Christ est « descendu aux enfers ». Que veut dire cette expression ? Elle veut dire que Dieu, qui s’est fait homme, est allé jusqu’au point d’entrer dans la solitude extrême et absolue de l’homme, là où aucun rayon d’amour n’arrive, où règne l’abandon total sans aucun mot de réconfort : « les enfers ». Jésus-Christ, en restant dans la mort, a franchi la porte de cette solitude ultime pour nous conduire et nous porter à la franchir avec Lui.

Nous avons tous ressenti autrefois une sensation épouvantable d’abandon, et ce qui nous fait le plus peur de la mort est justement cette sensation, comme, lorsque, enfants, nous avions peur de rester seuls dans le noir et que seule la présence d’une personne qui nous aimait pouvait nous rassurer. Donc, c’est ce qui est arrivé durant le Sabbat : dans le règne de la mort a retenti la voix de Dieu. L’impensable est arrivé : l’Amour a pénétré « dans les enfers » : même dans le noir extrême de la solitude humaine la plus absolue, nous pouvons entendre une voix qui nous aime et trouver une main qui nous prend et nous conduit dehors. L’être humain vit pour le seul fait qu’il est aimé et peut aimer ; et si, même dans le lieu de la mort, l’amour a pénétré, alors là aussi la vie est arrivée. dans l’heure de l’extrême solitude, nous ne serons jamais seuls…. »

Sources

Congregazione dei Preti della Real Chiesa di San Lorenzo, Via Palazzo di Città 4, 10122 Torino

Pèlerins vers le Suaire, diocesi di Torino, 2015

Michael Hesemann, Auf den spuren des grabtuchs von Turin, Verlag Petra Kehl, 2010

Michael Hesemann, Das Bluttuch Christi, Herbig 2010

Association « Union des Nations de l’Europe Chrétienne », pèlerinage aux Reliques du Saint Sang du Christ, 12 au 19 mai 2015

Alain Hourseau, Autour du Saint Suaire et de la collégiale de Lirey, Editeur BoD, 2012

Victor Saxer, « Le suaire de Turin aux prises avec l’histoire », Revue d’histoire de l’Église de France, vol. 26, no 196,‎ 1990, p. 21-55

Ulysse Chevalier, Étude critique sur l’origine du saint suaire de Lirey-Chambéry-Turin, Paris, Alphonse Picard,‎ 1900

Ulysse Chevalier, Autour des origines du suaire de Lirey, avec documents inédits, Paris, Alphonse Picard et Fils,‎ 1903

Philippe Contamine, « Geoffroy de Charny (début du XIVe siècle-1356). « Le plus prudhomme et le plus vaillant de tous les autres" », dans Philippe Contamine, Pages d’histoire militaire médiévale, Paris, Institut de France,‎ 2005, p. 171-184.
Republication, avec notes mises à jour, de l’article : Philippe Contamine, « Geoffroy de Charny (début du XIVe siècle-1356). « Le plus prudhomme et le plus vaillant de tous les autres" », dans Histoire et société. Mélanges offerts à Georges Duby, tome 2 : Le tenancier, le fidèle et le citoyen, Aix-en-Provence, Publications de l’Université de Provence, 1992, p. 107-121

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