Gouverner c’est prévoir et prévoir c’est aussi un acte de charité

mercredi 18 mars 2020
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Gouverner c’est prévoir et prévoir c’est aussi un acte de charité : en 1914 nos poilus au front sans casques, en 2020 beaucoup de nos soignants restés trop de jours sans masques protecteurs



Gouverner c’est prévoir nous a-t-on appris, et prévoir c’est aussi un acte de charité qui peut sauver de nombreuses vies. Si nos gouvernants n’avaient pas, depuis de nombreuses années, mis en route dans le secteur public, des plans drastiques de suppression d’hôpitaux, de réduction des lits d’hôpitaux et de contraction des personnels de santé, les régions "Grand Est", tout spécialement l’Alsace, ne seraient pas dans cet état de saturation des services, saturation qui risque de gagner d’autres régions.

Il en va de même de l’insuffisance catastrophique de masques et de produits désinfectants. Ainsi, face à la pandémie mondiale qui a atteint la France, contrairement aux affirmations ministérielles de janvier dernier, nous abordons cette crise sanitaire majeure dans des conditions très défavorables, et d’autant plus défavorables que le personnel soignant dans les hôpitaux se trouve déjà, depuis des mois, au bord de l’épuisement.

Ces personnels, dont il faut saluer le dévouement et l’abnégation, doivent ainsi aller affronter la maladie et les malades qui affluent de toutes parts avec un cruel manque de moyens, de matériels adaptés. A un siècle de distance, on se trouve dans une situation comparable à celle vécue par nos soldats de 1914, envoyés au front avec des pantalons rouges, naturellement très peu visibles, des armes globalement moins performantes que celles des Allemands et sans casques, lesquels n’arriveront qu’en 1915 !

Les politiciens de la république passent, l’impréparation demeure, les Français payent le prix fort.

Ajoutons à cela un manque de discernement, de réactivité, un vrai déni de la réalité quant aux risques d’extension de l’épidémie, et le poids de l’idéologie, conduisant trop longtemps à une absence de contrôles sanitaires aux frontières, notamment avec l’Italie, très impactée par la pandémie....Tout cela est consternant, une fois de plus.

Guy Barrey

Le virus tue, et ce n’est pas fini. Il tue les gens, mais aussi pas mal d’impostures. Petit échantillon non exhaustif

Extraits :

« Start-up nation. La 6e ou 7e puissance économique mondiale est donc incapable d’approvisionner ses pharmacies en masques de protection, produit low-tech, s’il en est. Et ce depuis trois semaines au moins, alors que l’épidémie progresse à toute vitesse. Lors de sa deuxième intervention solennelle, le président a bien promis des livraisons en urgence mais plusieurs semaines de pénurie, c’est déjà en soi un problème : avant la division planétaire du travail, ce n’est pas le président, mais un sous-préfet, qui l’aurait résolu… En écoutant les déclarations de plus hautes autorités, on ne pouvait s’empêcher de penser à ces petites affiches : plus de masques « pour cause de rupture nationale » (sic). Merci de votre compréhension ? Désolé, on ne comprend pas.

Start-up nation ? En ce moment on préfèrerait être le leader mondial des produits de première nécessité

Ou plutôt on comprend trop bien… Un ami bien-pensant à qui je faisais cette remarque a tranché : réaction populiste. Un autre m’a tancé : il faut les réserver en priorité aux personnels soignants (il n’a pas ajouté « espèce d’inconscient ! » pour ne pas dire « salaud ! », mais j’ai cru l’entendre…). Oui bien sûr, mais quid des caissières et du personnel des magasins d’alimentation, à l’évidence exposés et qui devraient l’être aussi (prioritaires), et pas toujours équipés, loin de là ? Et les vieux, pardon, les « personnes avancées en âge », les plus vulnérables ? Et, et, et.. Start-up nation ? En ce moment on préfèrerait être le leader mondial des produits de première nécessité.

Union européenne

L’Union européenne. Acte de décès : le refus des deux pays leaders, France et Allemagne, d’aider l’Italie, laissant le champ libre à la Chine. Ou peut-être la bourde de Christine Lagarde sur le « spread » des taux d’intérêt de la dette des pays membres. Aux dépens, une fois encore, de l’Italie… Giovanni Conte a prévenu : l’Italie s’en souviendra… Et nous aussi.

La libre circulation. Des marchandises, des capitaux, des gens, des virus - non, pardon, pas des virus… Et des idées bien sûr, mais pas des idées populistes … Mantra de la mondialisation et de l’Union européenne ; à droite par que c’est bon pour le business, à gauche par détestation des frontières et du « repli sur soi ». Le réalisme sordide et les chimères. Si vous voyez s’ouvrir une troisième voie, faites très attention, c’est justement l’impasse populiste…

Ce vendredi 13 mars, les « régulateurs » espagnol et italien ont interdit la vente à découvert sur les marchés, pour les protéger contre les traders qui voudraient parier sur une aggravation de leur chute. Parmi les entreprises confinées (sic), UniCredit, Fiat Chrysler ou Telefonica… Sinon, les spéculos vont profiter de la panique pour s’offrir l’Italie et l’Espagne à prix bradés… C’est beau, la libre circulation des capitaux et la société euro-libérale en général…

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La com ? Un camarade médiologue décrypte : « Dans l’allocution présidentielle d’hier soir (16 mars), la référence n’était pas britannique et Deuxième Guerre mondiale (Churchill, “du sang et des larmes”) mais française et liée à la Première Guerre, avec en particulier cette expression – elle concernait alors les anciens combattants – reprise à propos des personnels hospitaliers : “Ils ont des droits sur nous”. M. Macron n’était pas sans se prendre pour Clemenceau avec son anaphore martiale (“nous sommes en guerre”) : “Je fais la guerre, rien que la guerre. Nous serons sans faiblesse, comme sans violence. Le pays reconnaîtra qu’il est défendu.” (Discours d’investiture devant la Chambre, 20 novembre 1917). » Les mauvaises langues ironiseront, c’est une forme sophistiquée de « fake », terme qui ne signifie pas tant « faux » que « fabriqué » (contrefaçon). Cela dit, ça fonctionne : autour de moi (il ne reste plus grand monde !) on l’a trouvé « plutôt bon ». Et en ces circonstances, c’est peut-être ce qui convient, après tout...

Notre dernière heure aura du moins été une heure de vérité. »

Paul Soriano (Marianne)